mercredi 10 juillet 2019

Any time she sings a song, the other girls sing along.



"La définition de la folie, c'est de refaire toujours la même chose, et d'attendre des résultats différents."

Ou, en d'autres termes, vivre sa vie comme Lara Croft se prend des murs. 

C'est en réfléchissant à cette phrase que j'ai décidé d'entamer un vaste chantier dans ma vie. 

Six mois après, les changements sont là, en nombre, et pas forcément tous hétéronormatifs. 

Je suis en train d'acheter un appartement.
J'ai arrêté de me taper des mecs (blancs, cishet et surtout non déconstruits, si je dois préciser).
Je gagne bien ma vie.
J'ai cessé d'avoir pour hobby principal "me mettre 4 grammes et rentrer à quatre pattes en pleurant".
Dans l'ensemble, je gère mieux mes émotions grâce à une connaissance approfondie de comment je suis câblée, et ce grâce à ma super psychologue féministe pour qui je m'aventure jusque dans les tréfonds du 14e arrondissement, terre bretonne s'il en est.
Ma vie sexuelle a rarement été aussi qualitative et régulière (et j'encourage quiconque à explorer ailleurs que ce que les cours de bio sur la reproduction nous ont enseigné).

Si je n'ai jamais été aussi seule, je n'ai jamais été aussi stable. C'est une solitude saine, et la plupart du temps, elle est souhaitée. Souhaitable ? C'est un des derniers points qui me reste à régler. Faire la paix durablement avec moi-même. Si je m'apprécie et que je passe du temps qualitatif avec moi-même, je ne me souhaite toujours pas aux autres et ça explique sans doute pas mal mon souci à lier de nouvelles relations.

Ma psychiatre m'a annoncé qu'après une visite de contrôle à la rentrée, nos chemins se sépareraient. 
Ce n'est pas tout à fait de l'ordre des ballons et des confettis, mais on peut dire, ce jour, que je suis guérie de la dépression qui m'a saisie il y a un an tout pile. 

Depuis mon diagnostic, je n'ai fait que des choix rationnels, positifs, constructifs. Si je m'auto-congratule régulièrement, j'ai toujours une petite partie "golden retriever" en moi qui aimerait que mes proches me disent qu'ils le voient, qu'ils sont fiers, que je reviens de loin et qu'ensemble va continuer à être plus fort(e)s. 

A la place, j'ai reçu une certaine apathie, dans l'air du temps, me mettant le doute sur la visibilité de tous ces changements, de tous ces progrès

Et puis, quand j'ai commencé à vocaliser les changements les moins hétéronormatifs, j'ai enfin reçu une réaction.
Pas celle que j'attendais, malheureusement.

On m'a parlé d'inquiétude, du fait que j'abandonnais quelque chose (le risque non négligeable de me faire tuer par mon compagnon ? toutes les supers expériences que j'ai eues à force de fréquenter les mecs, allant des violences physiques, psychologiques, au viol ?) et que c'était dommage, qu'il fallait que je m'accroche (à la maison à la campagne avec des enfants et un épagneul breton ? Do you even know me?), et qu'on ne pouvait pas changer de route comme ça, que ce n'était pas naturel de passer de "omg j'aime la bite" à "je vais aller chercher de quoi me contenter auprès de personnes safe en maximisant les chances qu'elles ne me fassent pas volontairement du mal", parce que, voyez-vous, j'ai habitué les gens à aimer le corps masculin et à le proclamer haut et fort et, du coup, j'ai pas le droit de changer, au risque de perdre mon coeur de cible. Ahem. Mes amies étaient donc amies avec moi parce que j'étais très très hétéro ? J'aurais jamais cru. 

Loin de moi l'idée de me décréter LGBT, mais putain de merde, tout mon soutien, parce que ce discours de la part des personnes les plus proches et bienveillantes me laissent entrevoir ce que ça peut-être à travers un prisme d'ignorance, de malveillance et de bigoterie. 

Je tente de vivre ma vie en adéquation avec mes valeurs, c'est pourquoi je ne suis pas allée importuner mon dernier crush en date (qui se trouvait être un garçon, a priori) sur son lieu de travail, parce que clairement, je n'aurais pas aimé l'être si j'avais été à sa place. Si on se revoit dans d'autres conditions, je foncerais pour voir s'il y a moyen d'être assez en adéquation pour cohabiter dans la vie de l'autre un certain temps. 
Le respect des valeurs qui m'animent est beaucoup plus profondément inscrit dans mon ADN que mon hétérosexualité : hell, j'ai arrêté de manger des animaux dès que j'ai su pour la viande. Pourquoi n'ai-je pas arrêté d'accorder des faveurs sexuelles à mes principaux prédateurs ? ("GNAGNAGNA NOT ALL MEN" => on est à 76 féminicides cette année, 80% des assassins sont les compagnons ou ex-compagnons, qu'on ne vienne pas me reprocher de me protéger, also 12% des femmes ont été violées, encore une fois, plus de 80% des agresseurs font partie de leurs proches, vous avez TOU(TE)S des violeurs autour de vous vu qu'ils ne sont jamais condamnés même quand on les dénonce - enfin si, 1%, "not all violeurs are impunis" sorry). 

Bien sûr que si mon dernier crush en date est un homme déconstruit qui, pour rien au monde, ne ferait passer son bon plaisir avant ma sécurité et mon bien-être, je lui donnerai sa chance. Je ne souhaite pas pendre les hommes ou les cramer (enfin... pas tous), je dis juste que moi : je suis out. Je me retire du game de ceux-là.
Et, même en se drapant dans l'inquiétude et la bienveillance, personne n'a le droit de venir me dire que je suis dans le faux. C'est mon cul, c'est mon cœur, c'est ma vie, et j'en fais bien ce que je veux.