Une année de perte d'identité de plus qui a commencé par la question : mieux vaut-il être seule ou mal accompagnée ? Et qui se termine de la même manière, sans qu'aucune des options ne convienne. Comme souvent, la vérité est au milieu : se contenter des moments de plus en plus rare où les autres partagent un peu de leur temps. Leurs familles ne sont souvent pas plus saines que celle avec qui j'ai coupé les ponts, je l'ai appris à mes dépends en tentant le tout pour le tout, l'année dernière, afin de ne pas passer le 31 toute seule.
Alors ce soir, je le suis. Pour le meilleur, pour le pire. Et je dresse un bilan, en cet endroit qui m'a si longtemps servi et que je délaisse.
L'autre fil rouge de 2024, c'est d'avoir tant dépensé, en temps, en énergie, en monnaie sonnante, pour prendre soin de moi, ou tenter de le faire, sans que cela ne change grand-chose : si le monde veut nous nuire, peu importe le nombre de smics claqués en orthoptie, EMDR, pair-aidance, TCC, thérapie dialectique, clinique du sommeil.
On arrête des traitements pour y voir plus clair sur ce qui cloche, on trouve des pathologies rares (#pokemonshiny)(1/100 000 personnes)(yes, I), on démarre d'autres médocs, on m'attache à une machine la nuit (et pas du genre robot sexy...)
Quelques échappées, pourtant, remplissent les poumons d'un air trop rare mais culturellement, peu de neuf, beaucoup de vieux (Les Libertines, Tahiti80, Stuck in the sound, pour le come-back, Rock Horror Picture Show sur scène pour le recyclage, I monster à la Maroquinerie pour le rattrapage de ce que j'ai loupé ado)
Des tentatives pourtant nombreuses pour sortir de ma zone de confort qui se sont révélées chagrin. Le chaos du monde mondial qui créé des remous jusque dans l'intime. L'inconséquence d'une industrie culturelle, censée être à part, où tout va toujours plus vite. Trop vite.
S'en sortir par les chemins de traverse, la débrouille, la survie, comme toujours : c'est en devenant cat-sitteuse que j'ai fait mes plus belles rencontres. Celles non-verbales, à l'individualité assumée. A la fierté même dans les dérapages. A la moustache dressée et le poil brillant.
C'était ma grosse victoire de cette année, décrocher un certificat moi qui suis si inadaptée aux examens, aux chiffres à retenir par coeur, aux cours où il faut rester assis bien sagement.
J'oscille entre stagnation et périclitassions (ce mot !) Je suis comme cet arbre qui tombe dans la forêt. Sans personne pour l'observer, a-t-il vraiment existé ?
Je retiens des virées épiques à Moret-sur-Loing, à Rouen, dans l'excentrique musée Flaubert & de la médecine & un peu de Pierre Corneille aussi & il y a des momies, parce que pourquoi pas, sur l'île de Wight et son ferry au temps suspendu. Toutes ces envolées qui laissent un vide abyssal derrière elles, à se ce demander si ces expériences valent d'être vécues tant leur absence, au quotidien, est une souffrance.
Je ne vais pas vous laisser comme ça, à chouiner dans votre coupette, alors voici les coups de coeur, car il y en a eu.
Johnson solo est un rat de musées, c'est l'équivalent pour moi de Disney, et l'endroit qui tire son épingle du jeu, haut la main, c'est le minuscule musée Zadkine et son expo Chana Orloff en début d'année, et Modigliani (amour de ma vie) en sa fin. Ca a été l'occasion pour moi d'explorer les vestiges du Montparnasse, de voir tous ces lieux de gloire à l'abandon avant de me consoler au musée Bourdelle qui a su si bien conserver tout le patrimoine de cette époque.
Bien sûr, il y a eu des comédies musicales #lesangdelaveine, Les Miz à Paris, l'événement pour moi plus que les jeux olympiques, vus deux fois, et encore plus apprécié qu'à Londres où la nouvelle mise en scène, cheap, a été une déception, cette production m'a rabibochée. Grande année pour Hugo, mort flamboyant s'il en est.
Mention "ugly cry" pour Next to normal, oeuvre qui, bien qu'elle commence à dater et être datée sous certains aspect, a été une véritable claquasse dans ma gueule et a fait s'effondrer les 3/4 de son auditoire (c'était au West End, ne cherchez pas sur Paris, ça n'existe pas).
Je ne mets pas Yannis my old pal Philippakis dans les moments nostalgiques car je l'ai vu dans une nouvelle formation (Yannis & the yaw) et que c'était un renouveau salutaire qui m'a remplie de joie et d'une légèreté passionnée.
Et puis, comment ne pas parler du bulldozer : Romance de Fontaines D.C. album de l'année si ce n'est de la décennie. C'est par la petite porte et l'album solo de Grian que je les ai vraiment découverts (avant ils étaient comme ces gens qu'on croise sans les voir)(et c'est souvent les gens les plus importants sur lesquels on passe sans se retourner)(AHEM)
Leur concert, un 13 novembre, a guéri pas mal de choses en moi, et m'a montré que si j'étais effectivement très seule, il existait encore des gens fanatiques de cette même musique, même si nous ne sommes plus beaucoup et un peu désuets.
Mentions honorables en vrac : "Angel of my dreams" de Jade (ex Little Mix) pour son clip (easter egg alert si vous êtes fans de Fontaines D.C.), le groupe NewDad, The Last dinner party bien sûr, Wunderhorse, Chappell Roan (mais est-ce nécessaire de le préciser ?) et une résurgence assez monomaniaque du groupe Metric dans mes playlists. Très bon crû à l'Eurovision cette année (Nemo, Baby Lasagna, Bambi Thug, c'est tout ce qu'on aime). Enfin, j'ai plus croisé Lias Saoudi cette année que ma propre meilleure amie (il a été fourré à Paris et elle a eu un bébé, no judging), il est toujours merveilleux, et dégueu, et un génie littéraire, et malaisant, et sexy. On l'aime. Enfin, moi. Mais c'est déjà beaucoup, car mon coeur est énorme. Et il s'est serré fort en voyant la part belle faite à la French Touch cet été, merci Thomas Jolly, pour ça pour Starmania. Et merci Arté, pour l'ensemble de votre oeuvre et pour le docu sur DJ Mehdi.
Je vous laisse sur Christmas is back in time, de Gaspard Royant car vive la France, mais pas trop quand même.
2025, l'année où on trinque, sera encore plus solitaire, j'en suis sûre, encore plus chaotique, en espérant que les rares rayons solaires soient plus vifs, et réchauffent juste ce qu'il faut.
L'arbre dans la forêt va se taire maintenant, mais a-t-il vraiment déjà parlé ?