J'étais dans les mêmes murs, quand, encore un peu verte, j'avais une peur bleue du téléphone.
J'aurais pu avoir une note parfaite, rendre une copie sans tâche, mais il a fallu qu'on me demande d'appeler les parents d'une auteur EN ÉCOSSE.
Je sais pas si vous avez déjà entendu un écossais parler, mais représentez vous à peu près le pire cauchemar auditif de quelqu'un qui est terrorisé par le téléphone, par parler anglais, par parler à des inconnus, par les trois en même temps.
J'ai juste pas pu. J'ai pas fait. Et le jour où je me suis décidée, on s'est aperçu que les téléphones ne fonctionnaient pas à l'international. Tout ça pour ça.
Et aujourd'hui, me voilà, avec des nouveaux talons de 8, un skinny jeans et un sourire oh-so-fake sur les lèvres. Je trottine à droite, à gauche, je demande des services, je passe des coups de fil, je connais tout le monde et je tente d'illuminer la journée de ceux qui ignorent encore qui je suis.
Blagues faciles, anecdotes de connivence. Lâchage de grands chevaux quand il s'agit de défendre mon domaine.
Je ne suis plus une petite.
J'ai "directrice" sur ma feuille de paie. Et si celle-ci est quasi aussi mince que quand j'étais stagiaire, au moins, j'ai la liberté. Le calme.
Autour de moi, je n'ai jamais eu autant de bruit. "Mais quand est-ce que tu vires ton coloc ?", "Mais quand est-ce que tu castres ton chat ?", "Mais quand est-ce que tu cherches un travail complémentaire ?".
Well...
Fuck off, my friends.
Je réponds d'un ton mâtiné d'agacement - très léger - en essayant d'être le plus convaincante et explicative possible, mais dès que je les revois, rebelote : "MAIS QUAND ?".
Mais quand je l'aurai décidé. Je suis directrice. Je décide. Je réagis, je tranche, je propose, je dirige, j'accomplis.
Chaque chose en son temps. Laissez-moi retomber sur mes bottes. Partir à Londres avec ma personne préférée au monde. M'enivrer de concerts et d'acouphènes. Me dire que Marlowe aura une descendance impériale. Ne pas lire la rentrée littéraire. Ne pas coucher avec ce type "juste parce qu'il est partant".
Faire la paix avec moi, en gros. A nouveau. C'est pas si loin, je pense que c'est rattrapable. Si je me détends, l'alcool fera peut-être un peu moins surgir le démon en moi. Celui qui me fait décompresser d'un coup et me colle 1000 ans de discussions avec les amis, alertés par un comportement qu'ils ne me reconnaissent pas.
Live & let live.
Arrêtez de me saouler de questions, ou si vous tenez à le faire, posez-en des vraies bonnes intéressantes. Pas les mêmes incessamment. Pas pour me faire répéter un truc que j'ai déjà dit. Mais pour apprendre quelque chose de plus, et échanger. Vraiment. Parlez-moi de vous surtout.
Je prends toute la place, j'ai l'impression.
Je vous jure, j'arrêterai d'être "la fille à problèmes" quand vous cesserez de penser à moi comme telle.
J.
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