lundi 12 août 2019

When are you gonna come down? When are you going to land?



J'étais parisienne avant de l'être, tout ceux qui m'ont connue quand j'habitais encore le 7-6 vous le diront.
Quand j'ai débarqué en proche banlieue, il y a 12 ans, Paris c'était la grande aventure du week-end, je n'avais encore rien amadoué, ni le métro, ni le fait de se mettre à droite dans les escalators et encore moins l'esquive des gens des ONG. 
A la fin de mon année de licence, j'ai exploré le VIème arrondissement. Je savais que j'étais chez moi à Paris sans toutefois trouver ma place dans cette riche rive gauche bourgeoise et hautaine. 
Et puis, à la fin de ma première année de master tout a changé : j'ai découvert Paris côté bar, avec des potes, et j'ai décroché un stage place d'Italie à l'opposé de mon appart' minuscule logé rue Royale à Saint-Cloud. C'est là que ma BFF est partie et m'a laissé son appart dans le XXème.
Dès lors, tout s'est mis en place.
Le Père-Lachaise à deux pas et demi, vivre directement sur le métro, la grande débrouille solo. 
Mon stage suivant était aussi dans le XIIIème et j'ai commencé à comprendre que tout n'était pas bourgeois rive gauche. 
J'avais beau adorer le XXème côté Porte de Bagnolet et son melting-pot hyper simple, son ambiance village ronchon et ses rues pavées, l'immeuble où je vivais est vite devenu insupportable : cafards, rats, voisins intermittents du spectacle rentrant à 5h en mode rave party, voisine nympho avec murs en papier de cigarette, voisine folle qui sentait le cadavre avant même d'être décédée, boucherie au rdc qui tapait dans le mur dès 5h du mat et une agression manquée m'ont fait claquer la porte.

C'est grâce à Escrivaillon que j'ai eu une opportunité assez inespérée : sous-louer sa chambre dans le XIIIème, à deux pas de mon nouveau job. Attention vous allez vous pâmer de jalousie : je n'ai pas pris le métro pour aller au boulot depuis 2013. (Je suis beaucoup moins malade depuis, sachiez-le). 

Et puis Escri est parti parti et je suis restée restée. 
C'est l'appartement dans lequel j'ai eu Marlowe, mon premier petit chat à moi rien qu'à moi, qui a malheureusement été affecté par le Pica et, croyez-moi, j'aurais préféré que ce soit en lien avec Pokémon. 
C'est dans cet appart que je me suis réveillée, en pleine dépression, à midi, et que j'ai vu Matthieu Madénian pleurer en direct à la télé, et que l'après Charlie s'est dessiné lentement dans mon esprit embrumé. 
C'est dans cet appart que j'ai envoyé des textos à toutes mes potes le soir du 13 novembre pour leur dire de rentrer chez elle, ne sachant pas quoi faire d'autre. 
J'ai eu moult colocs, du mec qui voulait se taper toutes mes potes, à celle qui m'a permis de partir sereine au Canada en gardant Molly comme sa propre chair et son propre sang. 
Beaucoup de garçons ont défilé dans mon lit. Beaucoup d'alcool a été consommé. Un tout petit peu de drogue, aussi. 
J'ai passé des canicules dans la baignoire et des hivers à maudire le chauffage électrique. 
J'ai béni le système de sécurité digne de Fort Knox quand j'ai failli me faire agresser par un chauffeur de taxi. 

Jusqu'au jour où, pour la deuxième fois en trois mois, je devais trouver une coloc. 
Entendons-nous bien, j'adore la vie à plusieurs mais pas trop : chacun sa chambre et on partage les charges et les pièces de vie, c'est même indispensable à ma vie en général de vivre au milieu de gens. Mais voilà, j'ai 31 ans, et mes colocs ont un âge de plus en plus déclinant, si bien que je me retrouve avec une 96 à l'heure actuelle et force est de constater qu'on n'a plus le même niveau d'énergie, d'exigence sur le ménage et même plus assez de points communs pour dialoguer un minimum. 
So be it.
J'ai passé une tête du côté des agences immobilière et, chance, destin, aide de Satan, le premier appart que j'ai visité était dans une de mes rues préférées à Paris.
Celle où j'ai toujours rêvé d'habiter. 
Et je me suis projetée immédiatement. 

Tout à l'heure, en m'y rendant pour superviser le chantier, j'ai vraiment réalisé que j'avais conquis ce rêve beaucoup plus tôt que prévu. 
Ca a été au prix de longs mois de paperasse, de stress, de prises de bec et de jugements de la part de pas mal de gens. C'est très très énergivore d'acheter seul, à Paris qui plus est, notamment quand on est indépendant comme moi. 

Je suis allée déjeuner seule dans mon resto de coeur, en lisant tout ce que je pouvais trouver sur le quartier sur les internets. J'ai découvert une secte Belge à deux rues et relu les passages sur la commune. 
J'étais enfin heureuse. 

Le deuil de l'appartement a été long et remuant. J'ai été grandement aidée par le fait de vivre seule à Montréal. Je m'accroche à l'idée que ce que le chat perd en m², il le gagne en accès à l'extérieur.
Ce n'est plus Marlowe. C'est une femelle forte et féliniste, qui se laisse pas marcher sur les grosses papattes, elle s'adaptera, j'ai confiance.

Je vais être pauvre, mais chez moi. Sans avoir à me soucier de qui m'aidera à payer le loyer le mois prochain, je ne pourrai m'en prendre qu'à moi pour le ménage et je devrai me faire des amis pour avoir quelqu'un auprès de qui me plaindre gratuitement.

On est à l'aube d'une nouvelle ère. Et le story-telling de ma vie s'enchaîne tellement bien que j'en viens à me demander qui en est l'auteur. 

1 commentaire:

  1. J'aime tellement cette conclusion !

    Ça fait du bien, parfois, que tout s'emmêle comme il faut.

    RépondreSupprimer

Veuillez écrire un truc après le bip visuel : BIP