dimanche 23 mai 2010

Let me fly away

Je ne sais pas si j'ai des racines.
J'ai toujours eu de trop mauvaise relations avec ma famille et une nature trop sauvage pour ressentir un "home". 

Je me creuse des refuges, des petits appartements où rien ne peut me surprendre, où tout est contrôlé... ce qui se rapproche de la sécurité. 

N'empêche. Alors que je tape ces quelques lignes, le ciel est immense et presque aux couleurs du drapeau gay.

Si vous voulez, en plus de cette image qui ne rend pas compte de la hauteur, de la profondeur, de l'odeur et des criquets (en Normandie on a pas de cigales, mais on a la Seine), vous représenter ce que je vois, et bien,
en haut, à gauche, il y a la lune, à travers trois fils électriques de bon diamètre, par qu'il y a un pylône chez les voisins. De trois quart elle occupe la partie la plus sombre du ciel, et fait face à ce fameux drapeau gay : du violet au violet, traversé par du bleu du vert du jaune et de l'orange et du rouge, je vous fait pas le dessin. 
En face, une seule maison de l'autre côté de l'eau est allumée, j'imagine que tout le monde est un peu comme moi : présent mais sans la volonté d'allumer quelconque ampoule.

Le chat est venu voir ce qui foutait ce bordel, était un peu déçu de découvrir que ce n'était pas ma mère. Est vite parti. 

Il y a deux haies de chaque côté, j'ai toujours eu besoin d'être physiquement entourée pour me sentir en sécurité. Une peluche sur chaque oreille quand j'étais gamine, pour dormir. 

Les seules fleurs qu'on distingue encore sont blanches et hautes. Deux points verts clignotent sur la Seine : d'ici je vois une boucle complète à droite et un vers la gauche le début d'une autre forme arrondie.

Ecrire au clair de lune c'est comme devenir progressivement aveugle.

Une drôle de bestiole, deux points qui brillent, un ventre qui grogne, des pétards qui éclatent au loin.

Ce n'est ni un chevreuil, ni un blaireau (qui sont pourtant courants), c'est Théo, petit ami officiel du Lucifer, chat-de-moi depuis une dizaine d'année, qui vient voir s'il peut chaparder dans la gamelle. Chaparde, chaparde. Je ne suis pas le maître des lieux. Sers toi.

A vrai dire, je me sens toujours un peu aventurière, seule dans une aussi grande maison. Je me souviens d'un été où je n'en menais pas large, en pleine nuit, quand je m'apercevais que j'avais oublié de fermer les portes fenêtres, qu'il faisait déjà nuit et qu'il y avait du bruit au rez-de-chaussée. 

La maison est complétement isolée dans toute sa partie côtière et insérée dans un lotissement des plus banals de l'autre. D'abord commun et même laid côté route, elle devient Hacienda florale aux roses rouges grimpantes quand elle fait face à l'eau.

Je ne compte plus les chats qui viennent de traverser devant moi. J'en connais au moins 8 dans le coin. Et quand je dis connais, c'est que ce sont des intimes que j'ai déjà retrouvé dans la cuisine ou approché physiquement.

Les constellations pointent et je suis sous la casserole. 

Amis parisiens, le seul lieu chez nous qui se rapproche un tant soit peu est la place de la fontaine aux lions près de la cité des sciences. Ne me demandez pas pourquoi. C'est le seul lieu qui s'en rapproche un tant soit peu. Point. 

Peut-être à cause des lions en fait.

Je n'ai pas peur des bruits.

La dernière fois, c'était en Californie, dans un duvet, à côté de mon cher cousin chéri, et si je n'avais pas peur (pourtant, entre la proximité de la piscine, les serial killer de la région, leur voisin psychopathe, les coyotes du canyon à trois mètres et des rats gros comme des pitbull... j'aurais eu quelques raisons) c'était grâce à lui. Parce qu'il était là. Que je l'avais lui d'un côté, ma cousine de l'autre.
Elle est rentrée dormir à l'intérieur. Lui est resté.

J'aime les gens qui restent. Qui restent malgré tout.

Pourtant, quand je me suis réveillée, j'étais seule. Il avait pris son duvet à son cou.

Et j'ai réalisé une grande leçon sur les hommes ce jour là. Un peu moins chèrement que Buffy mais plus largement : qu'ils soient cousins, copains ou amants, ils ne faut pas vous attendre à les retrouver à coup sûr à côté de vous le matin.

(Oh et le seul garçon de ma vie à avoir toujours été là à mon réveil n'est vraiment, vraiment pas recommandable, donc ne vous en faites pas : ça se trouve ils sont partis acheter les croissants).

Je me sens en sécurité parce que seule je peux sortir les paraboles extrasensorielles que la présence d'autres humanoïdes paralyse.
Je suis au meilleur de mes capacités quand je suis seule.

Et pourtant, il faut être seule pour se rendre compte à quel point on l'est. Cette vie est d'un con.

C'est ce que je n'arrête pas de répéter au Lucio, qui se précipite dès qu'il entend des roues crisser au loin :

"Ils vont revenir, bientôt, ne t'inquiète pas."

Il m'a moi, mais je ne lui suffis visiblement pas. 
Autre grande manifestation du caractère masculin : ils ne sont jamais comblés et veulent toujours quelqu'un d'autre (ou quelque chose, je ne sais pas quelle version est la pire).

Et ça vaut pour mes amis les gays. Qui sont aussi girouettes que les autres mais qui assument plus que les hétéro tradis, il me semble.

Comment tirer de grands traits sur les garçons à partir d'un coin de nature qui n'a rien de naturel (mais plutôt tout d'un monticule où l'on pourrait construire un château) et ne regretter qu'une seule chose :

l'absence de chauve-souris.

Dans tous les sens du terme.



Ah tiens une vache accouche.

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