[Je ne peux regarder There are no innocent bystanders qu'une petite dose à la fois]
La plupart des gens autour de moi ne comprennent pas ma réaction post-rupture.
Sa longueur. Son intensité.
C'est parce que la plupart des gens autour de moi ne me connaissent que depuis très peu de temps. Pas assez, en tout cas, pour m'avoir vu avoir une crise de panique. Or, c'est le seul moment où ils sont confrontés avec ma "maladie", avec le côté "incontrôlable" de la situation.
Généralement ils se disent que je suis très sensible, que je grossis le trait, mais ne s'inquiètent pas plus que ça. Et puis, quand ils me voient enfin recroquevillée dans un coin, le visage tordu, muette et incapable de respirer : ils ne peuvent plus se mentir. Ils sont amis avec quelqu'un de malade, d'imprévisible et de faible.
Ce n'est pas facile à assumer.
J'ai perdu des gens à cause de ça, pas de vrais, bons amis, certes, mais depuis je n'en parle plus, à personne.
Et donc, je n'en ai pas parlé au Tinman... Jusqu'au jour où je lui en ai parlé.
D'abord un peu, et c'est ce qui lui a fichu la trouille, et puis clairement, avec les détails techniques.
Il m'a plaquée 24h après.
Comme nous n'en avons jamais discuté, je ne saurai jamais quel rôle a réellement eu cette révélation.
Mes amis ont tendance à me caser "dépressive" un peu vite. Je ne crois pas l'être : je l'ai été, longtemps, fort, puissamment. Ma dépression était un long tunnel noir, toujours égal, sans rien pour l'éclairer, jamais.
Je ne suis pas dépressive car j'arrive à sourire, à sortir, à voir des gens.
Je suis juste putain d'hypersensible, et il me faut mille fois plus de temps pour me remettre de tout. D'une simple bousculade dans le métro à un rendez-vous annulé à la dernière minute.
Je suis l'homme de verre des sentiments : une simple tournure de phrase peut me provoquer une angoisse persistante.
Les gens pensent que ma réaction n'est pas "normale", mais je m'attendais à peu près exactement à ça. J'avais d'ailleurs prévenu un peu tout le monde : il ne faut pas qu'il me quitte avant New York. Ils me disaient "mais si ça va te changer les idées".
On ne peut pas quitter quelqu'un dans mon état alors qu'elle s'apprête à se couper de tous ses repères, de ses "personnes", de ses médecins.
Je n'ai parlé de New York à personne.
Je n'ai parlé de New York à personne car, la vérité, c'est que j'ai failli ne jamais revenir de New York.
Mon retour à Paris, les repères brouillés, la vie qui avait continué, mon décalage par rapport à la réalité, a fait sortir tout ce que j'avais à dire, tout ce que je pensais, tout ce que New York a cadenassé : on m'a dit, samedi, que cela avait été interprété comme un "pétage de plomb.".
Non, c'était très sain. Plus sain que mon silence borné, mes sourires de façade et mon jeu parfait de la fille qui se remet.
Et, tout comme la dépression, j'ai connu des pétages de plomb : j'ai ravagé mon appartement Havrais quand j'ai appris que le garçon que j'aimais s'en était tapé une autre, alors que je dormais à l'étage, et que tout le monde savait depuis 15 jours, sauf moi.
A l'époque où je n'avais qu'une seule amie et qu'elle m'a annoncé, après un été à me jurer qu'elle était ma best friend forever, qu'on était juste "potes", pas amies, et que sa meilleure amie était une autre, j'ai pris son sac à dos et je l'ai balancé dans les escaliers, et j'aurais souhaité très fort qu'elle y soit accrochée, au sac à dos, croyez moi.
J'ai à moitié assommé un garçon quand je l'ai vu avec une autre, quand j'ai compris, quand cette meuf m'a toisé avec un air vicieux et lui a glissé à l'oreille un truc salace assez fort pour que je l'entende quand même. Ma main a écrasé la joue du garçon qui a valdingué sur la tête de sa copine qui elle même s'est pris un mur. Et après, c'est moi que j'ai jeté dans les escaliers.
Donc oui, je sais ce que c'est qu'un pétage de plombs. Je pète les plombs quand on ne me dit pas les choses, quand je les apprends après. Quand je les apprends mal.
Mon pétage de plomb aurait pu avoir lieu quand mon ex a joué à Confessions intimes avec un type qu'il détestait, un "pote" à moi dont il pouvait être sûr qu'il allait tout me répéter. Lui révélant à lui ce qu'il n'avait pas osé me dire à moi. Ce qu'il ne me dirait jamais. Le pourquoi ? qui m'obsède tant.
Mais samedi, on m'a aussi dit que je ne saurai jamais pourquoi, et qu'il faudrait m'y faire.
Sauf que, les personnes saines peuvent s'y faire. Moi, pas vraiment.
Je pense qu'à 88 ans, quand j'aurai oublié mon propre nom, je me souviendrai toujours de ce mot : "pourquoi ?"
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