[Thinking how beauty deceived you]
Je suis en cours d’écriture
créative et je souffre. J’ai pas signé pour ça. Ca fait partie de ma formation
et je ne peux y échapper.
Quand le prof nous dit
« écrivez, là, maintenant » j’ai l’impression d’être dans un avion et
que mon instructeur m’ordonne de sauter alors que j’ai pas encore bien mis mon
parachute.
Quand il commente mon texte,
j’ai l’impression d’être à poil devant un médecin qui me balancerait
« Faut faire du sport hein, c’est important. »
Pourtant, j’ai fait ma
kamikaze, je me suis portée volontaire pour lire en premier. Le théorème du
sparadrap.
Je suis en panne d’écriture
depuis 7 ans. Tout comme je suis en panne de lectures personnelles. C’est lié,
c’est clair. Et c’est lié à ma carrière. Et même Jean-Michel Blague, mon psy,
n’a rien à dire dessus vu que je lui en ai pas parlé. Avec mon séjour à New
York, c’est le second sujet dont je ne parle jamais.
Quand j’étais au collège, mes
« camarades » s’amusaient à faire des gestes violents autour de moi,
faire semblant de me mettre un coup, de me bousculer, parce que ça fonctionnait
super : tout de suite je me recroquevillais comme une tortue dans sa
carapace. Là, c’est un peu pareil. Dans ce cours, dès qu’on m’interpelle, même
si c’est neutre, même si c’est positif,
ma tête se tasse entre mes omoplates et mon dos se penche jusqu’à ce que je
sois parfaitement cachée par l’écran de mon ordinateur.
Je suis pas mauvaise parce que
je fais des gammes, ici déjà, et au boulot, quand je repasse la prose des
autres. Pourtant, dès qu’il s’agit de livrer un truc à moi, qui sort en direct
live de mes entrailles, je fais n’importe quoi. Ou j’en ai l’impression.
Je me suis pris des coups
critiques très durs, de lecteurs qui j’admirais beaucoup, et qui ont ruiné la
jolie confiance que j’avais empilée.
Dès lors que j’ai eu un
ordinateur, j’ai écrit. Je n’ai même fait que ça. J’ai arrêté le sport, la
musique, et je passais mes soirées, mes week-ends, mes vacances sur mon
traitement de texte. Je produisais en masse. A la fin du collège, j’avais écrit
8 romans.
Depuis 7 ans, j’ai dû écrire
une nouvelle, amorcer un roman, en tout et pour tout, j’ai peut-être aligné
100 000 signes (un tiers d’un petit roman pour les noobs).
Ado, je n’avais qu’une fierté,
une certitude, un trait de personnalité inamovible : j’écrivais. J’en
parlais librement. Je faisais lire autour de moi. Je ne m’en cachais pas du
tout. J’avais trois cartes en cumul à la bibliothèque parce que 5 livres pour
une semaine c’était trop peu, beaucoup trop peu.
J’ai ouvert mon premier blog à
16 ans, pour partager un peu plus et faire partie d’une communauté d’autres
gens qui écrivent. Et puis Internet a évolué, et écrire est revenu une activité
solitaire.
Quand je m’ennuyais en cours,
quand je m’ennuyais parce que personne ne voulait me parler, quand je suis
arrivée à Paris, quand je m’ennuyais parce que j’étais au chômage, ensuite.
Personne n’a jamais voulu me
relire, même si je savais fermement que c’était ce qu’il me manquait, alors
j’ai mis ma montagne d’écrits dans un carton, je les ai cachés derrière un
rideau, puis dans un meuble. La prochaine étape, c’est la cave.
Peut-être qu’un jour, chose que
je n’aurais jamais crue, je les jetterai.
L’écriture est intimement liée
à ma confiance en moi, qui est fluctuante de nature et qui fléchit beaucoup,
contrairement à Paris.
Etre entourée par autant de
talent(s) donne forcément des complexes. Et puis parfois je tombe sur des
choses vraiment mauvaises et je me dis « je peux faire mieux ! »
Mais je le fais pas.
Pourquoi je le fais pas ?
Parce que la vie. Les nouvelles technologies. Les soucis, en masse, qui me sont
arrivés de partout, ces dernières années. Parce que c’est plus facile
d’applaudir à quatre mains le génie fou des scénaristes de séries, vraie belle
avancée dramaturgique de nos temps modernes. De temps en temps, l’ami Oscar W.
se penche par-dessus mon épaule et me juge doucement, avec wit. De temps en temps, j’écris à des gens. A des garçons. Je sais
pas pourquoi, je corresponds mieux avec les garçons et je parle aux filles. Je
sais pas parler aux garçons et je prends pas le temps d’écrire aux filles.
Je flirte avec l’écriture sans
jamais m’y consacrer. Je la maintiens en vie artificiellement, ici. Je ne lui
tourne pas totalement le dos mais je ne lui ouvre pas les bras pour autant.
Donc là, ce cours, c’est comme
me jeter dans l’eau pour m’apprendre à nager.
Alors ça marche, parce que je
bats des pieds presque malgré moi pour garder la tête dehors, mais, disons, que
c’est pas ce qui me donne le plus envie d’aller passer des vacances à la mer.
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