['Cause you're gonna sing the words wrong]
Aujourd'hui, j'aurais pu brûler.
Non mais vraiment.
Je venais de rendre le test que je passais pour un nouveau job (qui serait le 4ème cumulé, si vous avez peine à suivre) et de remercier la dame, quand je me suis aventurée dans le dédale de couloirs à la recherche du très vieil ascenseur qui m'avait menée au 6ème étage.
Et puis j'ai compris pourquoi j'arrêtais pas d'éternuer depuis une demi-heure.
L'odeur, d'abord, et la fumée ensuite, de plus en plus âcre, et visible, et presque palpable.
J'ai alors réagi comme Marlowe devant toute chose dépassant son entendement (c'est à dire, presque toute chose) : je me suis figée et j'ai écarquillé les yeux. J'ai entendu deux trois "Non non c'est pas l'immeuble d'à côté, c'est bien celui-là" et la sirène des pompiers.
Ca m'a (légèrement) rassurée et j'ai commencé à bouger.
J'ai attendu nerveusement l'ascenseur tout en me disant que c'était la pire idée en cas d'incendie.
Il faut dire que j'avais la tête dans le cul jusqu'aux épaules, si vous me passez l'expression.
Si le feu m'a couru après ce matin, c'est la glace qui m'a enveloppée, cette nuit, quand j'ai parcouru toute la rue Nationale après un périple en Tramway pas piqué des hannetons (qui incluait un accident de la route).
Je crois que j'ai chantonné du Tom Odell (mon déjà tube de l'été) pour m'accompagner pendant deux kilomètres à pied nocturnes et glaciaux.
Je n'ai jamais autant marché que depuis 6 mois. Jamais autant vu de concerts, aussi.
Marcher avec la musique à fond, sans lunettes, pour le flou artistique, et m'abstraire de la foule tout en la parcourant.
Bon, là, c'était pas voulu. C'est que je revenais de BANLIEUE.
Vous me connaissez, je n'y vais qu'en cas de force majeure ou de mort imminente de l'être aimé.
Parce que je sais bien qu'en revenir n'est pas aisé. Et rien ne peut me retenir loin de Paris très longtemps.
Il se trouve que mon cas de force majeure était en l’occurrence ma plus vieille amie des Internets qui prend très à cœur sa mission d'infiltration de notre duo pop de commères éclairées sur tous les plateaux de télévision qui comportent 1) de la musique 2) de jolis gens 3) de quoi commérer de manière éclairée.
C'est pourquoi nous nous sommes rendues DANS LA NATURE, sous un CHAPITEAU, assister à une émission de LA TNT.
Aka Nouvelle Star, dernier programme que je suis scrupuleusement, plus par vieille habitude et attachement au jury que par amour de l'art.
Il en faut beaucoup pour impressionner météorologiquement une Bretonne et une Normande... Et beh des flocons de neige de la taille de mon œil qui te tombent en rafales sur la gueule à travers les branches pleines de bourgeons un 26 avril, ça déstabiliserait même un viking.
Mais ce n'était que le premier test du destin qui semblait vouloir s'assurer que nous étions véritablement motivées par le fait de passer toute une soirée en proximité maximale avec Dédé Manoukian.
Ensuite, il y a eu l'épiphanie brutale de la soirée sans alcool que nous allions passer... mais ce n'était rien à côté du choc... du drame ultime... la confiscation de nos smartphones. L'outil de bitching suprême. Le capteur d'âmes et de preuves qu'on y était. Stupeur, tremblements : on allait devoir s'adresser la parole et ce pendant une bonne heure et demi d'attente, debout, avant le prime.
En fait, c'est passé assez vite, et j'étais très curieuse de tout l'envers du décor. Ma dernière expérience télévisuelle s'étant faite chez Mimi Field quand il officiait sur la une et qui s'était si bien passée qu'on m'avait coupée au montage (mais maintenant je sais me servir d'un micro !)
J'étais surprise de me rendre compte qu'au bout d'une heure à subir les assauts du chauffeur de salle, je claquais des mains en rythme toute seule, au bon moment, et mon sourire se déclenchait sur commande et s'évanouissait à chaque coupure pub.
Pavlovien.
Depuis quelques mois, j'ai décidé de saisir toutes les opportunités et de tester tout ce qui me passe à portée de main. Alors pourquoi pas traverser l'écran. Ca fait 8 ans que je suis à Paris, et ça ne m'était jamais venu à l'idée, et au final, j'ai bien fait d'attendre d'avoir la compadre idéale.
Ce que j'en retiendrai, c'est la putain de difficulté de l'exercice pour les artistes. On était vraiment le nez sur eux, et ce qui se passe en off dans ce fatras rugissant de lumières, d'ordres lancés à tout va par les techniciens et de musique dans tous les sens, c'est juste l'enfer sur Terre pour se concentrer.
Je retiendrai donc le regard contrit des candidats forcés d'entendre et de voir un magnéto d'eux entrain de chanter juste avant de passer et de devoir délivrer toute autre chose, quelques instants après.
La putain de concentration que ça nécessite force le respect.
Le côté télé-réalité change beaucoup de choses et notamment le fait qu'on a de véritables humains, semblables à nous, devant nos yeux. D'une part parce qu'il font coucou à leurs proches - juste derrière nous - dès qu'ils ont cinq minutes, et de l'autre parce qu'on sent bien qu'ils sont dépassés par un système implacable, bien huilé, qui était là avant eux et qui le sera encore quand on les aura oubliés.
Ma curiosité me poussera très certainement à revoir ces chanteurs dans un contexte qui leur est propre, pour bien cerner où se délimite l'émission et où commence leur personnalité.
(Pour ceux que ça intéresse, je mets une pièce sur Patrick, le suisse qui chante les Belges, et qui arrive tant bien que mal à se démerder du rôle de sex-symbol que la prod lui a collé, avec un charme fou qui arrive, en se débattant fort, à percer à travers une gestion approximative de son corps)
Je réfléchissais à tout ça en remontant la rue Nationale, en écoutant mes groupes indie punk rock découverts dans des caves d'où tu ressors couverte de l'ADN d'au moins 5 personnes dont 2 mortes, à 1h du matin, par moins 1, à Paris, à la fin du mois d'avril, et je me disais que je me lèverai dans moins de 6h, pour aller relever un autre défi.
Infiltrer un quartier qui ne me ressemble que de loin, pour faire genre je suis compatible et tenter de plaire à une entreprise qui, sur un malentendu, pourrait bien me proposer le plus gros salaire que j'ai jamais connu. Sur un malentendu et contre 47,5h hebdo de mon temps.
Dans la 14, captant bon an mal an Jamie T entre deux stations, je me dis que le sacrifice n'en vaut pas la chandelle, mais que je suis comme Oscar, je ne supporte pas les regrets.
Alors je m'engage dans cet immeuble. Je me fais intercepter par celle avec qui j'ai rendez-vous, il va falloir meubler pendant 6 étages alors que je n'ai qu'un vingtième de ma dose de caféine quotidienne nécessaire. Je ne regrette pas du tout d'être allée me perdre sur D8 la veille. Les choses s'enchaînent pour une raison, et je ferai ce test fatiguée ou je ne le ferai pas.
C'est pourquoi, quand je plie bagage et que j'entre à nouveau dans l'ascenseur, et avec moi une brassée de fumée odieuse, dont tu te demandes ce que tu respires : de la chaise consumée ? De la braise de table ? ...Quelqu'un ?
Je me dis alea jacta est.
C'est la pire idée du monde de prendre cet ascenseur en plein incendie, mais hey, vu ton passif avec les descentes d'escalier en vol plané et ton sens de l'orientation, c'était relativement pas un choix si con.
Le temps est long. Long. Mais je reste calme. Je suis toujours calme au cœur des tempêtes.
Je croise quelqu'un entrain d'évacuer qui me regarde en souriant, comme pour me réconforter.
J'ai envie de lui répondre que je n'ai rien à perdre, moi, mais je garde la bouche fermée, et je couvre mon nez de mon écharpe.
Le gros camion des pompiers m'accueille sur le trottoir, où beaucoup, beaucoup de gens, s'amoncellent.
Je me faufile jusque dans le métro, entre le feu et la glace, retrouver un semblant d'anonymat, mon casque, mon indie punk rock, et, enfin, les bras chaleureux d'un fauteuil du MK2 Bibliothèque, les seuls à bien vouloir me distribuer des hugs, en ce moment.
Mais pourquoi je l'avais pas vu cet article moi !?
RépondreSupprimerOn fait quoi pour la prochaine ?
Taratata j'ai jamais fait. Ou La Musicale si Bolloré ne lui coupe pas la tête !
SupprimerMoi je pensais à Partons en live aussi, l'émission de Dédé sur France Inter. On peut varier les médias !
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