Les cartons vides viennent de partir dans les bras d'un jeune couple. Molly ne leur a presque pas grogné après. Ca marque la fin de mon déménagement, même si j'ai toujours du mal à réaliser.
Il faut que je réfléchisse dans quelle rue tourner, depuis une semaine, pour rentrer. J'ai un moment de stress au moment d'entrer le digicode. Je n'ai pas encore repéré où étaient toutes les poubelles et quels jours passaient les éboueurs. Je me bagarre quotidiennement avec la serrure de la boîte aux lettres.
Mais les livres sont sortis de leurs carcans et tout a trouvé sa place, si bien que ce matin, à genoux devant une table basse défoncée, j'ai commencé à peindre des lettres. Pour l'instant je n'avais la place pour faire sécher que "FEMMES VICTIMES DE" alors je suis partie à la recherche d'épingles à linge pour pouvoir compléter "VIOLENCES : ON VOUS CROIT" avant d'aller l'apporter à notre nouveau QG.
Je me suis octroyé le petit kiff d'aller coller en face de mon boulot, sur un rond point très fréquenté. Courir sur les pavés déformés entre deux feux à la lumière des réverbères a été une délivrance.
Dimanche dernier, alors que le camion de déménagement tournait quasi sur deux roues sur cette même place, j'ai senti un appel d'air sur ma droite : si ma pote n'avait pas mis sa ceinture, elle aurait peut-être roulé sur la chaussée, si elle avait tenu mon chat dans ses bras, je n'en aurais plus.
C'est pour ça, et parce que le déménageur que j'ai engagé a provoqué un dégât des eaux dans l'appart dont je partais, que j'ai fini le déménagement à tenter de contrôler une crise d'angoisse qui montait inexorablement.
Je n'en avais plus eu de telle depuis des mois.
Entre la réorganisation du mouvement, le déballage des cartons, les états des lieux, les dons d'objets et le boulot, je n'ai pas vu la semaine passer. J'ai couru d'un endroit à l'autre, d'une cause à l'autre, que ce soit celle de ma gueule ou d'autres moins égocentrées.
J'ai vissé mon plus fake smile devant ma boss pour éviter qu'elle trouve quoi que ce soit à redire au fait que je ne vienne plus aussi souvent. Pour autant, je n'ai plus la motivation d'avant concernant ce job qui a tant compté.
Un jour viendra où la culpabilité d'être à 90% de mes capacités au lieu des 120 habituels prendra le dessus, mais ce n'est pas le moment, pas quand j'ai 20 ans de dette à rembourser et du matos à payer pour aller retapisser les rues et espérer faire frémir les choses.
Bouger autant m'empêche de réfléchir trop, notamment au fait que j'ai 31 ans, accompli à peu près tout ce que je rêvais d'accomplir dans ma vie, et que je n'ai pas la moindre idée de quoi faire, de quoi vivre ensuite.
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