mardi 23 octobre 2012

Can’t you see this? I’m a man without tomorrow

Je vois R. à la télé.

Je vois R. sur mon ordinateur, en réalité décalée.

Je vois R., tête penchée.

Il parle de moi, il parle des autres. Il parle du temps d'avant.

Il ne ressemble plus à mon souvenir. C'est lui, mais différent.

Je le capte d'un autre angle.

Je vois R. à la télé et c'est un reflet de ma vie entière.

Je suis rentrée dans un Paris lointain, distinct, dans un appartement changé, sans repères et pourtant semblable.

Je sais tout faire encore : des courses au métro, j'ai consciencieusement ouvert mon courrier.

J'ai répondu à un entretien téléphonique pour un job comme un cinquantenaire va baiser une pute, juste pour me prouver que je pouvais encore assurer, alors qu'au fond je n'en avais pas vraiment envie.

Mon coeur fait de plus en plus d'embardées. Je l'entends affluer, surtout dans les périodes de grand calme.

Je touche ma vie du bout des doigts, oui je suis encore là. Mais plus rien n'est important.

Il n'est important de rester en vie que pour les autres.

Ceux qui rient à mon humour compliqué. Le même humour que R. qui lui, maintenant, les fait à des heures de grande écoute.

Je sais que ça ira pour les autres. J'ai été accueillie dans deux bouches de métro différentes par deux des plus beaux garçons que j'avais jamais rencontré, tous les deux m'ont proposé de porter ma valise. C'était furtif, mais ils étaient là. A porter mon fardeau, à alléger le poids du retour. Avec leurs grands yeux clairs, leurs tutoiements un peu cabotins et leurs grands bras. J'aurais aimé qu'au lieu de ma valise, ils m'enserrent moi. Juste trente seconde. Juste assez pour ne pas me briser le coeur en partant.

Je sais que ça ira pour les autres parce qu'ils ont compris plus vite que ma tête que nous étions une race de polygames masochistes, que l'amour n'est pas le couple et vice versa, qu'écouter ses pulsions fait moins mal qu'écouter son coeur, sa tête, sa morale.

Je sais que ça ira pour les autres parce qu'ils ne sont pas comme moi.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Veuillez écrire un truc après le bip visuel : BIP