dimanche 16 décembre 2012

We had this story of the impossible

[...a tale best told softly]

C'était une journée qui avait bien commencé. Autour d'une table de petit déj' dominical comme je n'en ai jamais connu, la faute à pas de famille.

Et puis nous sommes partis défendre l'égalité, avec un peu moins de sang qu'en 1789, mais sûrement autant d'enthousiasme.

Sur la centaine de personnes que j'aurais pu croiser à cette manifestation, il a fallu que je tombe sur ceux qu'il aurait mieux fallu que je ne vois pas.

Comme la gentille écervelée en laquelle je me transforme quand je suis contente, j'ai remarqué qu'il y avait pas mal de gens de twitter à la ronde, au démarrage du cortège. Des gens croisés dans la dernière époque heureuse de ma vie. Sans que je fasse le rapprochement. Sans que je me méfie. Sans que mon bouclier naturel ne remonte à mon cerveau et ordonne à mes jambes de fuir.

Je sens qu'une main se resserre autour de mon bras, si je n'ai aucune présence d'esprit, quelqu'un d'autre en a pour moi. Quelqu'un de bienveillant, heureusement, qui m'extirpe de là avant que je n'en vois trop. 

Parce qu'ils étaient là, les amis perdus après la rupture. La double-peine. Se faire larguer en un clic par un garçon, et voir s'éloigner les gens qui avaient gravité autour de vous. Je ne demande jamais aux gens de choisir, je m'efface, toujours. Mais là, je n'ai même pas eu mon mot à dire : on m'a fuie. La seule raison invoquée, par la seule personne qui a osé s'approcher une dernière fois fut ma trop grande douleur.

Je souffrais trop et donc ils ont préféré s'en aller.

Mais eux, sont toujours ensembles, et sont là, et paraissent soudés. Et ils vivent. Et ils sont passés à côté de moi, tandis qu'on me tirait à travers la foule. J'ai regardé leurs visages, familiers mais plus tellement. Ma première réaction, quand je les ai reconnus, a été un sourire, de l'oreille gauche à l'oreille droite, et puis le souvenir : eux non plus ils ne veulent plus de toi. Avance. 

Alors oui on passe à autre chose, on vit, on oublie les noms de famille de ces gens, on oublie surtout combien c'est dur de voir ces gens s'échapper de sa vie, un rejet après l'autre. Et celui-là, on se dirait presque qu'il nous manque. On se souvient qu'on a rêvé de lui, pas plus tard qu'il y a deux nuits, est-ce que c'était un hasard ? Un avertissement ?

C'est la douleur qui est revenue, en rafales. La douleur de l'époque où j'étais heureuse, au coeur d'un groupe de gens dont j'avais tout à découvrir et qui me passionnaient chacun à leur façon. De gens que mes amis plus anciens (plus fidèles aussi) ne comprenaient pas. De gens que je défendais bec et ongle, sans savoir vraiment pourquoi. Juste parce qu'ils me laissent être près d'eux et en apprendre un peu plus. De gens qui m'ont effacé de leur vie avec une facilité révélant le plus dur à entendre : que je n'étais rien qu'une fille de plus, une amitié à date de péremption, une amie jetable une fois que leur pote aurait fini de la consommer. 

Je crois que ce sont des gens que j'ai vraiment beaucoup aimé. Pas longtemps. Mais profondément.
Je crois que c'est pour ça qu'on n'a plus jamais revu mon sourire de la journée. 






vendredi 14 décembre 2012

If you just play along I promise we'll be fine


Quand il fait noir dehors, les vitres de mon bureau se transforment en miroirs.
Je me suis regardée 5 secondes et j'ai souri. 
Si ça fait un bail que j'ai fait la paix avec moi-même, ça faisait très longtemps que mon reflet ne m'avait pas renvoyé une image de fierté et d'accomplissement.

J'ai mon serre-tête fétiche de chaque côté du crâne. Je ne sais pas ce qui m'a pris le jour où je l'ai acheté, enfin si, je sais : il était violet, mais, depuis, il est là un peu malgré moi, dans les meilleurs moments de ma vie. 

J'ai failli le perdre quelque part dans la voiture de l'ex, comme un signe avant-coureur qu'il fallait partir. Je l'avais sur la tête quand on s'est rencontrés. 

Je l'avais aussi sur la tête à mon entretien décisif pour ce poste. Trois heures de marathon du sourire et du regard. Je ne regarde jamais personne dans les yeux, je ne souris pas beaucoup plus. 

Je ne suis profondément pas une fille à serre-tête et pourtant. Aujourd'hui, alors que la validation de ma période d'essai dépendait en grande partie du rendez-vous avec mon premier auteur, je me suis dit "oh allez, ça peut pas faire de mal.".

Encore une fois, il m'a porté chance. Comme ce ticket pour Wicked au Gerschwin theater retrouvé dans la poche de ma jupe.

Les objets, leurs apparitions, leurs disparitions, me disent des choses.

Ainsi, mon charmant bracelet thérapeutique "WWWASD" (what would we are scientists do) m'a lâchée deux jours après l'annonce du nouveau job, de la nouvelle vie, de la nouvelle Johnson.

En plein Disneyland Paris.

Comme si je n'en avais plus besoin maintenant.
Lui que j'ai serré fort pendant les épreuves qui se sont succédées depuis le printemps. Lui qui claquait contre mon poignet à chaque fois que j'avais envie d'arrêter les frais. Lui qui me faisait sourire, en dernier recours, quand les larmes montaient et que je pensais à It's fine to say this isn't a game / When you've already lost it / It's pointless to go through it again / But perhaps you've forgotten.

C'était bien. Mais il est en rupture de stock partout et je n'en trouve pas non plus d'occasion. Je prie pour un concert prochain de ce groupe salvateur-malgré-lui et je double prie pour que le merchandising en possède toujours.

So, Père Noël, if you hear me...

mardi 11 décembre 2012

It seems to be the way that everyone else get around


Je pense que si j'avais couché avec ce garçon, je serai moi-même devenue un "connard".

Alors me voilà, allongée sur mon lit d'ado, agressée par les souvenirs de la moi de l'époque qui se répétait "nan mais si j'avais une chance d'être avec quelqu'un, je serais pas comme toutes ces filles, j'hésiterai pas, c'est trop important, c'est trop rare.". J'ai envie de lui répondre "hey ho, tu m'as vue le soir du 6 mai ? Tu as vu ce que ça fait une relation quand ça implose ?". Et j'ai envie de lui payer une bière, à la moi de l'époque, mais je sais trop bien ce qu'elle dirait "han mais tu bois, mais tu t'étais toujours promis de jamais boire ? Mais qu'est-ce qu'on est devenues ?".

On a toujours été love's bitch (but at least we're man enough to admit it). Mais là, c'est tout sauf de l'amour.
C'est réfléchir quoi répondre à un type que t'as ramassé dans la rue, dans une ville où tu vas une fois par an grand max, et que tu as embrassé entre deux po(r)tes.

Quoi répondre encore - parce qu'il s'attache le petit pansement. Trouver la diplomatie en moi pour lui expliquer que les relations à longue distance, j'ai tenté, j'y crois moyen. Ne pas céder à la facilité de lui dire "j'ai toujours le coeur complétement en charpie à cause d'un autre" parce que ce serait la porte ouverte aux "je suis pas comme ça" "laisse moi une chance" "'azy demain est un autre jour.". 
Je n'ai pas envie d'argumenter mon cul. Les choses se font naturellement ou ne se font pas. Je ne me bats pas pour les garçons, je ne l'ai jamais fait, et quand un mâle me met en concurrence avec une autre de mes congénères je lui réponds "too bad" avant de tourner les talons. 

Si ce n'est pas de moi qu'on a envie, mais d'une relation, avec n'importe qui, c'est un tue l'amour absolu. Je ne suis absolument pas assez lisse pour convenir à la case bien bordée de "petite amie". Je suis une timebomb émotionnelle difficile à gérer qu'il faut connaître un minimum avant d'adopter.

Je ne peux pas lui dire tout ça. Ce serait trop en dire. Je ne peux pas lui dire que j'ai senti que ça n'allait pas coller, même si oui, je l'ai senti. Je le sens toujours. J'ai un superpouvoir qui fait que je sais à peu près combien de temps je vais rester amie avec quelqu'un, et même si la date précise de ma rupture avec l'ex m'a prise au dépourvu, je savais que ça n'était pas parti pour durer. 

Alors je reste froide, factuelle, calendrière, la main droite sur son agenda d'éditrice, une armure qui me donne le droit "ah non on peut pas se voir, je suis perchée, je suis dans mon but, je suis une cadre qui a beaucoup de boulot, va-t-en garçon.". 

Je ne sais juste pas si demain je rencontre un garçon tout près, tout compatible, tout volontaire et engageant, je ne lui ressortirai pas le même discours. Une petite voix me dit qu'au contraire, je me jetterai dans ses bras avec peut-être un peu trop de gratitude et que je réitérerai les mêmes erreurs. Je crois qu'il n'y a pas de bonne solution. 

Et surtout, je crois que l'amour existe, mais pas pour tout le monde.

vendredi 7 décembre 2012

Don't look back into the sun

Je me lève encore un matin sur trois en souhaitant que mon ex s'en veuille jusqu'à la fin de ses jours, mais, dans l'ensemble, il y a du très mieux concernant tout ce pan de ma vie. 

Ma relation avec lui m'a transformée, en l'espace du très peu de temps qu'elle a duré, en un zombie de l'amour. 
Non pas que j'ai été follement transportée de sentiments envers lui, bizarrement je me suis blindée tant que j'ai pu, et j'ai tenu plus d'1 mois et demi avant de vraiment ressentir quelque chose de crucial. 

Le zombie de l'amour est juste ce que je deviens quand je suis heureuse. 

Et, c'est peut-être loin dans vos têtes, mais le moment où on s'est mis ensemble était le point culminant de mon heureusité. En fait, c'était tout bonnement la première et seule fois où j'ai été heureuse de toute ma vie. 

Je me suis donc transformée en HappyJohnson. 

La Johnson usuelle étant un être qui a pour unique moyen d'expression la critique, le sarcasme et le cynisme, La Johnson habituelle étant entourée d'une aura de pessimisme et de misanthropie,
La Johnson basique étant un être malheureux et qui ne s'en cache pas,

...forcément, quand j'ai été heureuse, ça a été le choc, je ne disais plus rien, je me contentais de fixer les gens avec un sourire bienveillant, certains disent même m'avoir croisée dans les couloirs de la ligne 3 prise d'un fou rire sans fondement, d'aucuns ajouteraient que je parlais aux oiseaux et que je ne bousculais plus les petits enfants.

Quand on me côtoie tous les jours, on s'habitue à me voir débiter les pires états de faits, on prend du recul par rapport à mes phrases intransigeantes et on apprend à aimer le petit coeur tout mou qui se cache derrière la rugosité que je laisse transparaître. J'étais donc une inconnue à morphologie familière. Un état déroutant qui a un peu soulagé mes proches lorsqu'il s'est envolé. Lorsque je suis redevenue HeightsTheAllYearLongGrinch.

Non, tout cet étalage n'est pas gratuit. Il fait partie de ces notes en forme de "mode d'emploi à destination des Heightsiens du 8ème cercle" parce que préparez vous, les gars, si mon nouveau boulot continue sur sa lancée, vous risquez de passer 2013 avec le terrorifiant* ZOMBIE OF LOVE.


*spéciale kassdédi

vendredi 16 novembre 2012

The world is great to suckers.

Ca faisait un certain temps que je n'avais pas eu envie de me faire mourir. 
Et, ça, en soit, c'est une petite victoire.

Ce soir je me suis souvenue que je n'étais rien. Rien qu'un ectoplasme tout juste bon à guider ses congénères, faits, eux, d'âmes et de sang. 

On me l'a rappelé. On m'a remis à ma place de fille qu'on bouscule sans s'excuser, de moins que rien, de risible petite chose ingrate.

C'est parce que je suis cette chose-là que je peux d'autant moins accepter l'amour gratuit et sans limite d'un illustre étranger. Tout aussi illustre et tout aussi étranger qu'il soit. Un garçon qui ne m'a jamais connu ne sait pas qu'il perd son temps. Qu'il ne se serait jamais arrêté sur mon passage s'il m'avait rencontré dans cette "vraie" vie.

Toute ce qui restera de mon existence, maintenant, je me souviendrai que la première fois que j'ai cru être aimée, il s'agissait d'un mirage. Que le seul qui a compté était persuadé d'être avec mon personnage de méchante-vilaine-fille et pas avec moi. Que pour le seul qui ait compté, j'ai été une erreur d'interprétation. Une perte de temps. 

Qu'en fait, dans la vie, je n'ai jamais été aimée. 
Par personne.

Cette vérité est d'autant plus vraisemblante après un week-end, où, quand j'ai été vraiment moi-même au sein de ma famille, j'ai subi un rejet en bloc, massif. Habituel. Historique.

D'autant plus présente que, quand on fait la liste, tous les gens supposés m'aimer se sont exilés et n'existent pas dans ma vie de tous les jours.

Je peux jongler avec des ciseaux loin d'eux. Ils savent. Je suis trop faible pour faire quoi que ce soit. Ils peuvent être des lointains. Des gens opportuns. Que j'accueille forcément à bras ouverts, car ce sont les seuls, après tout, à accepter, à bien vouloir m'aimer un peu. Un jour. Deux. A un moment. Mais pas longtemps.

Je suis la fille qui écrit bien. Mais que ça n'a jamais mené à rien. Je suis la fille qui comprend un peu trop ce qui se passe autour d'elle pour rester insensible.

Je ne suis pas la fille qui s'est entendu dire, dans les bras d'un garçon géant, "je n'aurais pas dû laisser mon tour.". Je suis la fille qui est piétinable. Insultable. Malaxable. 

Je réussis dans la vie. Professionnelle. Alors de quoi me plains-je. L'amour c'est superflu.
Je suis la fille pour laquelle on ne se fait pas de souci.

jeudi 15 novembre 2012

Whatever happened to the great escape ?



"Combien tu en as embrassé depuis ?"

Je vois mon index se lever à la hauteur de mes yeux.

"Et c'était comment ?"

Pas bien. C'était pas bien.

"Pas bien."

On est dans mon antre. Où je me sens plus chez moi que chez moi.
J'ai embrassé des garçons ici. Et c'était bien. 

Elle ne me pose pas plus de questions.

Ce qui est bien, avec mes amis, c'est qu'ils ne posent pas énormément de questions. Je peux cadenasser à peu près ce que je veux. 

C'est comme ça que j'ai façonné la Johnson de Paris, loin de la gamine qui échafaudait des plans de vie alambiqués sous un ciel de Normandie. 

J'ai beaucoup improvisé, mais j'ai rapidement appris un truc : ne jamais mentir. Tourner autour de la vérité. Ne pas tout dire. Mais ne jamais dévier.

C'est comme ça que j'ai oublié New York, en n'en parlant pas. C'est sûrement pour ça que quelques petits mois en ont pourri six, parce que je ne peux m'empêcher d'en parler, et d'en reparler, jusqu'à ce que je comprenne ce qui s'est passé.

Quand on répond vaguement aux questions, on a l'air mystérieux, et les gens aiment bien connaître des gens mystérieux. 

Mais je laisse parler le silence trop souvent et parfois il en dit trop, je ne sais pas comment le remplir et je laisse filer le temps.

Depuis mon retour j'ai entrepris de revoir tous les gens pas vus depuis des années et de laisser un peu les autres tranquilles. Il reste les gens à qui je suis incapable de réécrire, et c'est nouveau, ce mutisme, envers ceux-là. 

Et il y a enfin mon mutisme face à celui qui  n'est pas au courant qu'il y a des mois, j'ai décidé que ce n'était pas sain du tout, pour une fille comme moi, de se laisser compter fleurette par un garçon comme lui. Un prince comme dans les livres, - mais avec princesse intégrée.

Il continue à être un rayon de soleil quotidien, comme depuis plus de deux ans, et ce, malgré mon absence de répondant. Je voue une haine curieuse à ce garçon à qui tout réussit. Et je ne suis plus sûre de savoir si mon détachement est dû à la bancalité de la situation ou à une envie insidieuse qu'il passe à côté de moi, puisque moi, je n'aurai jamais quelqu'un comme lui. J'haine souvent les gens impossibles à aimer.

We have the story of the impossible 
A tale passed on so frail. 
One of make-belief 
Maybe impossible to achieve 
And really close 



lundi 29 octobre 2012

This doesn't have to end in tragedy


Elle est blonde, elle est suédoise, on en est à notre troisième verre de vin rouge.

Elle me dit "Tu veux pas un petit pansement ?"

Je suis pas sûre de comprendre ce qu'elle veut dire, je me dis que c'est parce qu'elle est blonde, qu'elle est suédoise, et qu'on en est à notre troisième verre de vin rouge. 

Mais elle insiste "Un petit pansement ! Non ?"

Du coup je suis partie backward dans la discussion.

On m'a demandé, maintenant qu'on bosse plus directement ensemble, de parler de ce que j'écrivais. 

Du coup, j'ai pensé à Oscar Wilde. Mais pour parler de ça il fallait parler de pourquoi je suis tombée dans ma monomanie des comédies musicales. Il fallait que je parle du copain qui était au début comme Hugh Grant dans une comédie romantique et à la fin, comme Hugh Grant dans la vraie vie*. 

Du coup j'en ai parlé. Un peu réticente. Parce que je me suis pris tellement de "boarf..." et de "roh ça fait longtemps", "roh ça veut rien dire ça a pas duré longtemps". La tête entre les épaules, le vin qui remonte dans l'oesophage, j'ai parlé. 

En retour j'ai eu des "Roh le con", "Un mail ? C'est qu'il était pas bien." et, enfin, le "mais la douleur que tu ressens dépend pas du temps passé avec quelqu'un.". Hallelujah. 

Et puis est venu la tirade du petit pansement.

Du coup je lui demande de m'expliquer.

"Oh c'est simple, quand on est trop sensible c'est galère : on peut pas se remettre en couple tout de suite parce que c'est trop dur et on peut pas avoir de plan cul régulier parce qu'on s'attache, et que ça fait trop mal, alors il y a les petits pansements, pour la nuit, juste pour se sentir bien, avec un gars bien..."

"...mais pas assez longtemps pour s'attacher."

J'ai tout de suite senti que cette appellation allait changer ma vie.

C'était ma première soirée dehors depuis mon retour. Comme si, Paris, essayait de me dire d'arrêter de m'en aller, que tout irait bien, qu'il y a plein de gens qui valent le coup, ici.

Et ça, c'était en plus des deux gentlemen-canons que Paris m'a envoyé pour porter ma valise à l'improviste à deux stations de métro différentes. 

Je reste méfiante. Je reste distante. Paris est froid, Paris est plein de recoins noirs de la mélasse de mes souvenirs. Paris veut me faire tomber dans le piège du romantisme, à nouveau, comme le Diable me tenterait pour avoir mon âme.

Alors je me suis prévu deux tromperies, une à Rome, une à Londres, histoire de signifier à Paris que je suis pas si attachée que ça, et qu'il va falloir plus que deux garçons furtifs et des gentilles, jolies, amies pleines d'esprit pour me retenir, pour me faire totalement revenir.


*Merci, Mindy.

mardi 23 octobre 2012

Can’t you see this? I’m a man without tomorrow

Je vois R. à la télé.

Je vois R. sur mon ordinateur, en réalité décalée.

Je vois R., tête penchée.

Il parle de moi, il parle des autres. Il parle du temps d'avant.

Il ne ressemble plus à mon souvenir. C'est lui, mais différent.

Je le capte d'un autre angle.

Je vois R. à la télé et c'est un reflet de ma vie entière.

Je suis rentrée dans un Paris lointain, distinct, dans un appartement changé, sans repères et pourtant semblable.

Je sais tout faire encore : des courses au métro, j'ai consciencieusement ouvert mon courrier.

J'ai répondu à un entretien téléphonique pour un job comme un cinquantenaire va baiser une pute, juste pour me prouver que je pouvais encore assurer, alors qu'au fond je n'en avais pas vraiment envie.

Mon coeur fait de plus en plus d'embardées. Je l'entends affluer, surtout dans les périodes de grand calme.

Je touche ma vie du bout des doigts, oui je suis encore là. Mais plus rien n'est important.

Il n'est important de rester en vie que pour les autres.

Ceux qui rient à mon humour compliqué. Le même humour que R. qui lui, maintenant, les fait à des heures de grande écoute.

Je sais que ça ira pour les autres. J'ai été accueillie dans deux bouches de métro différentes par deux des plus beaux garçons que j'avais jamais rencontré, tous les deux m'ont proposé de porter ma valise. C'était furtif, mais ils étaient là. A porter mon fardeau, à alléger le poids du retour. Avec leurs grands yeux clairs, leurs tutoiements un peu cabotins et leurs grands bras. J'aurais aimé qu'au lieu de ma valise, ils m'enserrent moi. Juste trente seconde. Juste assez pour ne pas me briser le coeur en partant.

Je sais que ça ira pour les autres parce qu'ils ont compris plus vite que ma tête que nous étions une race de polygames masochistes, que l'amour n'est pas le couple et vice versa, qu'écouter ses pulsions fait moins mal qu'écouter son coeur, sa tête, sa morale.

Je sais que ça ira pour les autres parce qu'ils ne sont pas comme moi.

jeudi 11 octobre 2012

Your ears are full but you're empty

[Photo by C., éternelle stagiaire de l'hormone]


Ici, r.à.s depuis mon arrivée - à un jet d'oeuf et de cure-dent près (oui, mais un jet d'oeuf et un jet de cure-dent depuis le 6ème étage, quand toi t'es sur le trottoir, c'est impressionnant). 

C'est un peu disneyland. 

On sait que la presse est muselée, que le prime minister est un néonazi et que tout n'est pas bleu à Budapest.
On le sait, quelque part, loin, mais en fait non. Ca ne se voit pas. 

Comme l'absence de couleur. Tous ces gens tout blanc dans les transports en communs. 
J'en viens à regretter les familles africaines à 8 gamins qui prennent ma ligne 3 le dimanche, à Paris.

Les rues sont vides, les yeux des gens un peu aussi. Personne n'est triste, personne n'est heureux. Tout le monde attend que le feu passe au vert.

Je suis dans le même état. J'erre.

Je n'ai plus de buts dans la vie. Avant, j'espérais connaître l'amour un jour, ou du moins, une vie à deux, pour voir. Maintenant, j'en suis revenue. Je n'ai plus d'espérances de ce côté là. Je n'en ai plus ailleurs non plus.

Je n'aime pas mon métier. J'en ai fait le tour dans la dimension où on me laisse progresser - c'est à dire l'assistanat jusqu'à 30 ans, just because

En trois ans, je suis allée au Japon, à Stockholm, retournée à Prague, retournée ici, et sur la liste de mes choses à faire avant de mourir, j'ai dû batailler ferme pour trouver quelque chose à écrire... 

Il reste Damon Albarn et quelques destinations. Il reste des choses comme ça.

Je suis donc un zombie hongrois comme un autre. Je profite juste un peu plus du prix affolant des restos, du bon vin et de pouvoir me balader en chemise mi-octobre. Ca n'est pas si mal.

Ici, ils n'ont pas détruit les statues du communisme, ils les ont rassemblées dans un petit parc à l'extérieur de Budapest, comme nous faisons avec nos ordures dans un immeuble, un peu. J'ai quelques jolies photos. 

Pendant ce temps là, Viktor l’extrémiste parraine un musée sur les deux terreurs consécutives qui ont écrasé le pays, du coup, ça va.

Pendant ce temps là, plus un rom dans les rues. Ou si, un. Histoire de. Il y a 20 ans, ils étaient partout, par grappe, 8, 10, 12, comme les oeufs. Je me demande bien comment ils ont pu s'évaporer. Je crois qu'il est préférable de ne pas trop se le demander.

Une jolie ville avec une âme très sombre.

jeudi 4 octobre 2012

Deep in the cell of my heart

[I will feel so glad to go]

Dear Friend,

J'aimerais t'écrire que je vais mieux. J'aimerais t'écrire que je ne me réveille pas chaque matin en cherchant les débris éparpillés de la grande et forte fille que j'avais cru réussir à construire, un jour, quelque part, l'année passée.

J'aimerais te dire qu'un garçon, en très peu de temps, en un mail, n'a pas réussi à l'abattre. 
J'aimerais te dire que cette semaine, je n'ai pas fini The Perks of being a wallflower et que ça ne m'a pas laissé pour morte cérébralement pendant deux jours.

J'aimerais te dire que si je n'écris plus ici, si je n'écris plus ailleurs, c'est que j'écris beaucoup pour moi.

J'aimerais être, sincèrement, comme ces gens qui changent de vie tous les mois, qui progressent à une vitesse fulgurante et qui passent à autre chose.

J'aimerais que ce garçon soit arrivé à quelqu'un d'autre que moi. 
Parce que j'étais la dernière à le mériter.

Parce qu'il aurait fait du mal à une autre, mais certainement pas autant qu'à moi.

J'aimerais ne pas sursauter, ne plus trébucher, ne pas baisser les yeux. J'aimerais retrouver la personne sûre d'elle que j'avais patiemment conçue, que j'étais petit à petit devenue. 

Je ne la retrouve nulle part.
En tout cas pas sur cette plage que je parcours tous les soirs, au milieu des débris.
Pas sur cette plage où je m'assois et me demande comment la plus jolie chose qui me soit jamais arrivée n'était belle que pour moi. 

Comment j'ai pu, une fois encore, vivre quelque chose d'unilatéral, et sans m'en rendre compte une seconde.

Comment je peux me souvenir de cette période comme d'une fulgurance brillante, comme d'un bonheur tonitruant, coupé court et coupé net aussi soudainement que violemment, quand, en fait, il s'agissait de toute autre chose.

Je ne vis plus. Je suis en attente de quelque chose qui n'arrivera pas. D'une réponse sans laquelle je pleurerai encore tous les soirs. 

Cher ami, je sais que tu te frappes le front en lisant ces lignes, je sais que tu pensais que ce voyage ferait l'affaire, que je chopperai graveleusement du mec de l'est en me disant l'autre n'était rien
Mais New York a été un chemin de croix, et Budapest est le purgatoire.

Je ne sais ce qui m'attend, à part une longue vie d'attente.

mercredi 12 septembre 2012

Fuck this awful art party


Je me souviens du moment, cette année, où je me suis le plus sentie en couple.
Ca n'était, bien évidemment, pas avec mon copain du moment. 

C'était dans un local industriel réhabilité en galerie, c'était devant un tirage d'une photo mythique de Jim Morrison, et c'était avec mon nouveau gay préféré. 

Le garçon caméléon qui peut se transformer en hétéro-gendre-idéal selon les circonstances.
Le garçon que j'avais décidé d'inviter à mes soirées de boulot et qui est passé pour ma moitié, tout simplement parce que je n'avais pas précisé.

Entre des petits fours de l'espace et l'open-bar champagne, j'étais, bien entendu, tombée sur des collègues plutôt floues, de celles à qui on n'a jamais affaire, qu'on se demande bien ce qu'elles peuvent faire, d'ailleurs, dans leur bureau là-bas... 

Ce sont d'ailleurs ces collègues là, vous le remarquerez, qui s'intéressent le plus à vous quand, d'un coup, la souillon de l'édito apparait avec un joli garçon à son bras.

C'est tout un art de ne pas mentir mais de laisser croire. 

Je me souviens parfaitement du moment où il a fallu battre en retraite sur la mezzanine, quand l'alcool est monté trop haut, trop vite, trop fort, quand, protégée des collègues en talons aiguille par des escaliers trop hauts, il a pu redevenir le pote gay et moi Johnson, et qu'on a pu critiquer de tout notre saoul l'assemblée en trinquant comme des stéréotypes parisiens.

Parfois les gens qui jouent des rôles me paraissent plus vrais, plus indiqués, que ceux qui existent vraiment à ces places dans ma vie. Je pourrais vous parler, au hasard de ma famille, la vraie, et celle que j'ai reconstitué.

Et c'était complétement le cas. 
J'étais ce soir là en plein dans l'idée que je me faisais du couple - et qui n'avait rien à voir avec ce que j'avais à la maison. 

Je n'avais même pas proposé au "vrai" copain de venir, pas parce qu'il aurait fait tâche - et il aurait fait tâche, mais je m'en foutais -, mais parce que le "vrai" copain ne m'assumait déjà pas devant ses propres potes. Je me sentais toujours très déplacée en arrivant aux soirées d'amis d'amis où il se trouvait. J'accompagnais des potes en commun et il était là, on n'arrivait pas ensemble, on repartait en groupe. Personne ne pouvait se douter de qui j'étais pour lui à moins d'être Sherlock Holmes. 

Je revivais silencieusement la honte que la Bête, avant lui, avait de moi, avec la même certitude, au creux de mon ventre, que je finirai de toute façon la nuit avec lui. Que ça n'était pas grave, qu'il lui fallait du temps. Qu'il fallait que je me fie à toutes ces choses encourageantes que nos potes me disaient, et pas à l'image qu'il me renvoyait de moi.

Cette soirée là, avec l'ami comme +1, j'avais un garçon qui s'affichait avec moi, ni fièrement, ni honteusement, il était juste là. Je lui avais demandé de l'être et il était venu, à l'heure, souriant, s'amusant clairement malgré les circonstances un peu guindées. S'amusant surtout parce qu'on était tous les deux. 

Ce qui m'attriste, c'est que je ne suis pas sûre de trouver cette simplicité, cette clarté, cette acceptation avec un mec hétéro (célibataire). J'attends. Je sais que ça existe, pour d'autres.

Je sais juste que mon prochain mec devra m'aimer et m'accepter, et pas que dans l'obscurité. 
Ce qui me chagrine, c'est que pendant longtemps, je pensais que ce n'était pas trop demander.



samedi 8 septembre 2012

The same voice coming to me like it's all slowin' down



Sur le mur, derrière l'autel, est accrochée une toile presque plus immonde que celle restaurée par l'octogénaire espagnole. Sauf que celle-ci est originale. 

Je suis assise entre Mémé et Lucienne. Le corps n'est pas arrivé, l'atmosphère est soutenable pour quelques minutes encore. 

"J'ai 77 ans !" "86..." 
"Et beh moi 24."
"Toi, t'es dans la fleur de l'âge ! T'as encore la vie devant toi !"

Je lève les yeux vers cette année écoulée. Vers ce caisson où on m'a enfoncée. 
On ne peut pas pleurer quand on passe un IRM. 
On ne peut pas bouger. 
Si on pleure, c'est de la torture. Rien que d'imaginer les larmes, la morve, coulant sans pouvoir l'essuyer.

Alors on ne pleure pas pendant un IRM. 

C'est à ça que je pense quand l'église se remplit un peu plus. 

Mémé voit une dame en noir entrer et me hurle "PORTUGAISE !", sans trop vouloir hurler. 86 ans.

Je ris. Je lui demande si elle a bien éteint son portable. "Non. Mais je l'ai pas pris."

Elles reprennent leur discussion par dessus moi.

"C'est allé vite. Un mois et pouf !"

C'est allé aussi vite que recevoir un email avec les plus vieilles photos qu'on pouvait trouver de lui. Et bien sûr, sur ces clichés, l'image de mon grand-père, jeune et fringuant, comme je ne l'ai jamais connu.

Depuis sa mort, aucune ne m'a réellement touchée. 
Les enterrements se sont succédés et j'ai pris le rôle utile de la personne qui a des mouchoirs à portée de main, qui dit aux vieilles quand il y a des marches, qui regarde où est le cimetière sur son gps. 

Je sais très bien, comme je sais très bien tout le reste, quel prochain enterrement me touchera.

Le prêtre me regarde de travers quand je ne fais pas le signe de croix, quand je ne chante pas, je guette sur son visage les signes d'un AVC imminent lorsqu'il marque 5 secondes de pause entre chaque phrase. 

Il répète à quel point il était "discret", et j'ai l'impression qu'on enterre une ombre. 

Je me dis qu'à mon enterrement, je voudrais que des gens qui chantent juste. Et des jeunes. Et du rock.

Les tombes se ressemblent toutes, dans le cimetière, et je comprends que je suis devenue une bourgeoise de la mort, à force de ne fréquenter que des nécropoles huppées.

La responsable des pompes funèbres est d'une vulgarité sans nom. Incapable de retenir 5 lignes par coeur, elle lit son speech, ses bourrelets dépassent de sa veste cheap, ses cheveux gras à peine coiffés. Je me dis que je ne veux pas de ça non plus.

Ca parait long un enterrement, surtout pendant les prières, mais en fait ça n'est rien.

Un transfert pour une éternité en deux heures à peine. 

Et puis rentrer, pour s'occuper des conséquences de la prochaine tumeur sur la famille, en attendant de fuir, loin et longtemps. 

mercredi 5 septembre 2012

Maybe we could find new ways to fall apart

[Si je devais avoir un gourou ce serait Mark Foster, pas Oscar Wilde]
[C'est son Twitter la secte.]

Me voilà au carrefour de ma vie avec pour toute check-list "trouver un mec incapable de me faire volontairement du mal."

J'ai mis 2 ans et demi à me remettre de La Bête. Nous sommes 4 mois  quasi jour pour jour après ma séparation d'avec le Tinman. Et j'ai réalisé beaucoup de choses.

Le Tinman m'a fait plus de mal que La Bête. 

Quand le Tinman a commencé à auto-saboter notre relation, ça n'était pas personnel, ça n'était pas contre moi. Mais quand il s'est empressé de poster sur twitter qu'il avait mélangé sa salive avec une inconnue une semaine après m'avoir implacablement plaquée : c'était motivé par l'exact même sentiment que quand La Bête m'a ouvert le crâne. Il a volontairement voulu me faire du mal.

(Ce qui n'est pas dans l'ordre des choses quand on sait que c'est lui qui est parti.)

Mais bon, j'aurais pu lui pardonner ça. Juste ça. 
 Sauf qu'il a enfoncé le clou en commettant ce qui m'avait déjà fait péter un plomb à l'époque de La Bête : aller tout livrer de notre intimité à un type dont il savait qu'il n'était pas de confiance. 

Et c'était pire, car si La Bête a confié ça bêtement à une fille qu'il aimait bien sans réfléchir qu'elle s'en servirait contre moi, Le Tinman, lui, est allé voir un type dont il était clairement jaloux - pour rien - durant toute notre relation. 

La cruauté de La Bête a été dépassée par son petit successeur que j'avais choisi en partie parce qu'il me semblait glorieusement inoffensif. 

Et finalement, dernier parallèle, et non des moindres, La Bête et le Tinman sont tous les deux venus ici lire et se repaitre de mes atermoiements. 

Tout le monde leur trouve l'excuse de la curiosité, plus forte que tout. 

Mais quand le contenu de ce blog n'est qu'une longue litanie de souffrance, de bile et d'écartèlement intérieur, où finit la curiosité et où commence le sadisme ?

Se vautrer dans le malheur qu'on a causé, revenir, des jours, des semaines, des mois durant, ça n'a pas d'autre nom. 

Le plaisir de la souffrance, de l'auto-destruction, du drama ont toujours été clairs et assumés entre La Bête et moi. C'étaient, à vrai dire, les bases de notre "relation". 

Ca n'était pas le cas avec le Tinman. J'avais quelque chose de viable. De positif. De presque beau. Il y avait quelque chose du genre "deux gens traumatisés par leurs relations passées vont essayer de prouver que quelque chose d'autre est possible.". 
Et puis non. Et puis la rupture, débile, avant même d'avoir essayé d'avoir une relation. Une rupture dans les plus mauvaises conditions pour moi, les meilleures pour lui, je pouvais, déjà, être déçue et en colère. Et puis il y a eu sa mini-vendetta à la saveur de fierté masculine. 

Je ne vous raconte pas le nombre de gens venus après coup me dire "tu sais, il a jamais rompu avec son ex en fait", je ne vous raconte pas le nombre de ses potes qui ont, eux aussi, voulu connaitre les détails intimes et à qui je n'ai rien lâché, je ne vous raconte pas la boulette d'un de ses copains me confirmant malgré lui que le Tinman était bien allé voir ailleurs...

Je ne raconte que l'histoire d'un type qui m'a fait du mal pour se sortir de notre relation et qui, ensuite, m'a fait du mal inutilement, volontairement, gratuitement. Je vous raconte l'histoire d'un type qui aurait pu me redonner confiance et qui, en partant, m'a laissé au point où j'en étais avant La Bête.

La Bête m'a plongée dans la noirceur, la violence, la destruction mais il m'a poussé à renaître, plus forte, plus belle, plus déterminée.

Ca a mis une immense dose de temps.

Tout ça pour qu'un soir de mars dernier je fasse l'annonce à mes amies que ayé, j'étais prête à un truc. Je savais pas quoi, je savais pas avec qui.

C'est tombé sur le Tinman. Ca s'est passé assez miraculeusement. Ca s'est fini dans la noirceur, la destruction et l'horreur, moi recroquevillée sur les bords de Seine puis à Harlem.

La Bête ne m'a jamais rien donné mais ne m'a jamais rien promis. Il a été abject, lâche et nocif, mais il ne me devait rien.

L'autre m'a fait entrevoir un bonheur attendu depuis 23 ans, pour me le retirer - et de quelle façon - aussi vite qu'il était venu. Il a été vain, mesquin et n'a tenu aucune de ses promesses, surtout pas la dernière. Surtout pas celle de s'en vouloir.

Alors arrêtez de vous étonner quand je place le Tinman au-dessus de La Bête, et même au dessus de mon paternel, dans la liste des hommes qui m'ont fait le plus de mal. 

Il a amplement, et magnifiquement remporté cette place.
 

mardi 4 septembre 2012

My sorry-ever-after [Final Part]


Il est revenu dormir à la maison. Plusieurs fois.

Un soir, après avoir invité à dîner l'ex-couple d'ami, nous étions tous les deux assis sur des chaises, posées devant ma fenêtre ouverte sur 4 étages de vide.

Nous parlions. Pour la première fois depuis des lustres, nous parlions sérieusement, de sujets profonds. Nous échangions.

A ce moment là, j'ai eu un regain d'espoir furtif pour notre amitié. 

Et puis. Sans prévenir. Il s'est levé.

M'a regardé avec le sourire le plus creepy de l'humanité.
Puis, sans me lâcher des yeux, il a enjambé la rambarde.

J'ai ri jaune en lui disant d'arrêter ses conneries.

Il a passé la moitié de son corps au dessus du vide.

Tout en me regardant. Droit dans les yeux.

Il a levé sa seconde jambe pour qu'elle rejoigne l'autre. J'ai eu le temps de rassembler mon esprit en un bloc d'adrénaline et je me suis enroulée autour de sa jambe. De tout mon poids. 

Quand il m'a dit de le lâcher, que j'allais voir, que j'allais voir ce que ça faisait.

J'ai attendu un long moment. Le plus long moment d'horreur de ma vie.

J'ai éclaté en sanglots. 

Il n'a pas cillé.

Je l'ai imaginé, au ralenti, tomber.

Je l'ai vu dans ma tête, écrasé sur le sol.

J'ai remarqué qu'il se tenait fermement par les mains.

Puis j'ai pensé fuck it

J'ai lâché prise.

J'ai foncé jusqu'à la salle de bain où je suis restée de longues heures. Sous la douche. A pleurer.

Quand je suis revenue. Il était couché sur le sol. 

Je me suis mise dans le lit, persuadée que cette fois, je ne le pardonnerai pas.

Pourtant, au milieu de la nuit, je me suis allongée par terre, contre lui. 

Le lendemain matin, je lui ai expliqué qu'effectivement, je ne le pardonnerai jamais, qu'il fallait clairement qu'on se sépare quelques temps mais que je n'arrivais pas à me faire à l'idée de vivre sans lui.

Il m'a balancé que bien sûr je le pardonnerai, que je le pardonnais toujours.

Je suis partie. Brisée de l'intérieur. Choquée. Dévastée. Incapable de réaliser que personne, sauf lui et moi, ne saurait jamais la noirceur qui l'habitait.

Toutes ces fois où il s'était jeté dans les escalator, toutes ces fois où il avait posé la main à plat sur les plaques chauffantes soi-disant pour voir si elles étaient chaudes... La cigarette. Et ce soir-là.

Je suis partie quelques temps dans le sud. Mais il n'arrêtait pas de me dire qu'il allait me rejoindre, et je vivais avec la menace constante de son retour. L'envie qu'il soit là.

Je l'ai appelé un soir, complétement saoule. Une voix féminine riait derrière lui. Il m'a expliqué simplement que c'était sa stagiaire - enfin non - enfin... - la stagiaire de son pote.

Je savais que c'était L'Autre Fille. Je savais qu'elle avait gagné. Je savais à quel point elle avait perdu, maintenant qu'elle était sa chose.

J'ai décidé de m'évader à Barcelone, pour réfléchir. Mais avant cela, il fallait que je retourne sur Paris. Je voulais profiter de l'appartement vide du couple pour laver mon linge. 

Personne ne m'avait prévenue que La Bête serait là. Avec L'Autre Fille. Préparant la voiture pour leur grand départ en vacances, un matelas sous le bras pour dormir à la belle étoile, dans le coffre.

Je ne leur ai pas adressé la parole.

Puis il est venu vers moi. Je m'apprêtais à lui envoyer quelque chose de bien senti à la gueule mais il m'a devancée, en me tendant la clef de chez moi et en me disant :

"Tiens, je n'en aurai plus besoin."


Voilà comment s'est terminée cette histoire.

La nuit suivante j'étais dans le bus pour Barcelone, et j'ai su. J'ai su que plus jamais je ne retournerai dans ses bras, plus jamais je ne lui ouvrirai ma porte, plus jamais je ne voulais le voir.

Et j'ai tenu parole.

Mais j'avais promis autre chose, à quelqu'un d'autre. C'était l'anniversaire d'une amie, il serait là. J'avais préparé une lettre lui expliquant que je ne voulais plus jamais le voir.

J'y suis allée, me jurant de ne pas boire, de ne pas boire pour ne pas lui parler. Puis un pote m'a glissé, un, deux, trois verres d'une mixture horriblement addictive.

Je suis tombée dans mon coma d'idée habituel.

Je me suis réveillée sur la terrasse, La Bête, assis en tailleur en face de moi, torse nu. Nous nous engueulions en anglais.

Je me suis levée, j'ai voulu partir.

 J'avais oublié quelque chose, je suis rentrée à nouveau. Là, dans le couloir, j'ai croisé La Bête et L'Autre Fille - je vous ai dit qu'elle n'était toujours pas Officielle ?. Quand elle m'a vu, elle s'est serrée contre lui, puis lui a glissé à l'oreille, assez fort pour que je l'entende, en me regardant "viens, on va dans la chambre.".

C'est à cet instant là que je suis redevenue Heights Slapette Johnson, volcanique, caractérielle et indestructible. C'est à ce moment-là que je me suis réveillée de mes 6 mois de douleur, de torture et d'amour avorton. 

Je me suis approchée d'eux, à la stupeur de La Bête, et j'ai levé ma main bien haut dans les airs. La gifle qu'il a reçue était si puissante qu'elle l'a propulsé contre sa copine, qui elle même s'est cogné la tête contre le mur.

L'Epilogue est qu'il avait oublié de lire ma lettre, il l'a lue 15 jours plus tard, il m'a fait dire qu'il était totalement d'accord sur le fait qu'on ne se revoit jamais. 

Il m'a aussi fait dire que mes notes de blog sur lui (et elle) étaient inacceptables. 

Puis il m'a fait dire que si je voulais revenir aux soirées, je pouvais... que ça le gênait pas... qu'il... qu'il voulait bien me revoir.

Je n'ai jamais cédé. Jamais failli. 

La seule fois où je l'ai revu, par accident, j'ai fait une crise d'angoisse monumentale. Mais ça n'était qu'un vertige dû à l'image qu'il me renvoyait de la moi difforme que j'ai été pendant tout ce temps avec lui.

A ce moment là, j'avais intégré la Sorbonne et un nouveau groupe d'amis, je sortais tous les soirs et j'ai même fini par dormir avec une rockstar.

Mais c'est une autre histoire.


lundi 3 septembre 2012

My sorry-ever-after [Part X]


Nous avons passé toute la journée du lendemain ensemble, jusqu'au soir, où il est rentré chez lui.
Rien ne s'est passé.

C'était une répétition de notre première journée ensemble après notre première nuit, les rôles étant inversés. Je faisais comme s'il ne s'était rien passé dans les escaliers, comme s'il n'était pas revenu dormir à côté moi pour une raison.

Nous étions amis.

Et puis il a eu une copine, et, jubilation, ce n'était pas L'Autre Fille.
Non. Son Officielle, il nous en a parlé en des termes peu glorieux avant même qu'on la rencontre. Répondant à chaque fois que ses potes demandaient "alors, tu l'as baisée ?" par "Non, elle a des champignons.". Ce garçon était la classe incarnée, au cas où vous ne l'auriez toujours pas remarqué.

Tout se serait bien passé dans le meilleur des mondes entre nos amis, La Bête, L'Autre Fille, L'Officielle et moi, si seulement L'Autre Fille ne s'était pas retrouvée dans l'état lamentable où, moi aussi, j'avais été.

Je savais que L'Officielle ne ferait pas long feu. Qu'elle serait même prise entre deux feux. Je me pensais hors jeu, et heureuse de l'être.

Puis L'Autre Fille a lâché une bombe, tout bas, à mon oreille. 

Ce que j'avais raconté à La Bête, tous les deux, dans la pénombre, à notre réveil, après son interrogatoire sur mes tentatives de suicide. Tout ça, et plus, il l'avait révélé à une inconnue. Une inconnue qui ne me voulait clairement pas du bien.

Je suis entrée dans une rage folle. Mais je l'ai contenue, pour ne pas faire ce plaisir à L'Autre Fille. 
Tout la soirée, elle a égrainé mes secrets intimes à mon oreille, des choses que je n'avais dites qu'à La Bête.

Quand elle est partie, je l'ai suivie. 

Je lui ai demandé une explication, loin de La Bête, dans le hall de l'immeuble. 

Je voulais clairement que la Guerre Froide cesse, et je lui en voulais à lui de lui avoir révélé tout ça, elle n'était qu'une victime collatérale de sa couardise.

Alors que nous discutions, et que je lui assurais que lui et moi n'étions qu'amis et n'avions toujours été qu'amis, que je l'avais décidé dès le premier jour, 6 mois auparavant.

Elle s'est alors illuminée, comme si elle avait eu une révélation et m'a dit "6 mois ? Mais c'est rien 6 mois... Vous n'êtes vraiment rien alors.". Ravie d'avoir réalisé mon rien, elle est partie.

Je suis remontée, je me suis saoulée, et j'ai fait une scène à La Bête, scène interprétée - bien sûr - comme une crise de jalousie envers L'Officielle. 

Il m'avait trahi. Notre amitié, neuve, belle et fraîche, n'était qu'une illusion de plus. Non seulement il me trompait durant toutes ces nuits où il rentrait couvert de bleu, mais il m'offrait en pâture. Il me tournait en ridicule. Il avait osé exposer mon intimité à la première inconnue qui passait.

J'étais définitivement over him, et, si un événement plutôt tragique pour lui - la séparation de ses meilleurs amis - n'était pas intervenu, je crois que tout se serait arrêté avant que l'irréparable soit commis.

La soirée de cette séparation, il m'avait ignorée, une fois de plus.
J'avais fini avec un - très - jeune étudiant, à folâtrer dans l'herbe, à la vue de tout le monde - la grande classe de La Bête avait dû m'infecter.

Lorsque j'en ai eu fini avec ce garçon - que je ne voulais pas revoir, oh non non non. Je me suis cachée derrière La Bête en lui disant "je veux pas le revoir, passe moi les clefs je vais rentrer."

Il m'a demandé, gravement, si j'avais couché avec ce mec, j'ai répondu non.
Il m'a demandé si je ne voulais vraiment pas de ce mec, j'ai répondu non.

Il est parti sans me donner les clefs.

Je suis retournée chercher des visages connus, quand on m'a appris la nouvelle : nos amis s'étaient séparés.

Je suis restée quelques instants à consoler l'élément féminin du couple, puis je me suis demandée où était La Bête qui n'allait forcément pas bien réagir à la nouvelle.

On m'a appris qu'il était avec le garçon que j'avais roulé dans l'herbe. Ils étaient posés à discuter sur le terrain de foot.

Je me suis alors lancée dans un commando, allongée sur le sol, les coudes en avant, dès que j'étais trop proche d'eux pour marcher.

Dans le silence de la nuit sur le campus, je l'ai entendu parler de moi, lui expliquer que je n'étais pas une fille facile, qu'il ne se passerait rien cette nuit, que je valais le coup, qu'il fallait me laisser une chance, que j'étais le genre de fille qu'il fallait emmener au restaurant.

Je suis repartie, en commando. J'ai croisé, en rampant, un couple semblant encore plus s'amuser que moi dans l'herbe.

Et puis je me suis relevée. Et j'ai attendu que La Bête revienne. Faisant un travail important sur moi-même pour ne pas lui sauter à la gorge sur ce qu'il avait osé dire à ce gamin. Sur le fait qu'il n'était pas mon père, encore moins mon mec et qu'il n'avait pas le droit de s'immiscer à ce point dans ma vie, pas après ce qu'il avait déjà dit sur moi. Et pour le préparer, tranquillement, à recevoir la nouvelle de cette séparation qui, pour lui, était comparable à un hypothétique divorce de ses parents.

Il est arrivé. Il a commencé à me parler du garçon. Je l'ai interrompu.

Je lui ai annoncé, en une seule phrase. Une main sur le bras. Autant pour le retenir, l'empêcher de me faire du mal, que pour le soutenir.

Il ne m'a pas crue. Je me suis souvenue alors qu'il n'avait aucune confiance en moi.

Puis l'élément masculin du couple est arrivé. Il a confirmé la nouvelle. La Bête s'est écroulée de l'intérieur mais nous avons serré notre ami dans nos bras.

Et puis, quand l'étreinte a été rompue, La Bête, m'a sauté dessus, au moment où je m'y attendais le moins.

Il m'a plaquée sur le sol. Violemment.
Ma tête a heurté une pierre.

J'ai vu plus d'étoiles qu'il n'y en avait réellement.

Il m'a laissée là, mi-inconsciente, mi-inconsolable.

Je me suis relevée.

Il n'y avait plus de place nulle part, ils étaient tous couchés.

Il n'y avait plus que le lit de La Bête.

On m'a dit que cette nuit là, on nous avait retrouvé, lui roulé en boule dans mes bras, moi, la main dans ses cheveux.

N'importe qui serait allé à l'hôpital se faire recoudre la tête et peut-être même dans un commissariat.
N'importe qui, sauf moi.


dimanche 2 septembre 2012

My sorry-ever-after [Part IX]



J'ai été positivement dévastée. Trainant mon vague à l'âme dans l'oreille de tous mes potes qui avaient tous la même réponse "mais vous allez vous réconciliiiier". 

Et chose fut faite à ma soirée de crémaillère, où je l'ai vaguement invité, et où il est arrivé, après tout le monde, faisant à moitié la gueule.

Il y avait L'Autre Fille, également, elle était devenue incontournable dans nos soirées - mais toujours pas officielle.

Il m'a attrapée par le bras, alors que je dansais. 

Il s'est excusé pour la première et dernière fois, puis nous nous sommes serrés dans les bras.

Je suis sortie de cet échange sincèrement ravie d'avoir retrouvé un ami
J'étais en bonne route pour ne plus rien ressentir de déplacé pour lui.
 
Puis L'Autre Fille est partie et il la raccompagnée. Il m'a dit qu'il remontait. Je l'ai laissé faire.

Une heure après alors qu'il n'avait toujours pas reparu, je suis descendue.

Elle était en pleurs, assise dans ma rue et il la consolait, comme il l'avait fait de nombreuses fois pour moi après m'avoir hurlé dessus.

Elle m'a vu et est partie, me montrant dans un geste et lui disant quelque chose comme "reste avec elle."

Je suis remontée. J'avais un ami. 

Je ne l'aimais pas. Je ne l'aimais plus.
Puis, après quelques danses, des mains inappropriées sous ma robe et une douche collective tout-habillés-tout-bourrés, il a décidé qu'il rentrait chez lui.

Je l'ai accompagné, pour lui dire au revoir.

Il m'a dit que c'était con, que j'allais avoir plein d'étages à remonter. Je lui ai dit "on se dit au revoir là alors ?". Il s'est arrêté au milieu de l'escalier. Quelques marches plus bas que moi. 

Il m'a regardée. Je l'ai regardé. Je lui ai dit "Au revoir.". Il m'a dit "Pas de bisou ?". 
Je ne sais pas trop ce qui m'a pris. Peut-être le fait que, pour la première fois, il était à ma hauteur.
Je l'ai embrassé sur les lèvres.

Je pensais très sincèrement qu'il allait me faire valser contre le mur.

Il m'a dit "encore ?"

Je l'ai à nouveau embrassé.

Il m'a dit "...encore ?"

J'ai arrêté de compter.

J'ai explosé de rire en comprenant que si je l'avais embrassé lors de notre première soirée je me serais évité 6 mois de torture. J'ai compris qu'il était effectivement un ami. 

Je suis remontée profiter de ma fête, puis, tout le monde s'est couché, dont deux personnes devant la porte, faute de place. 

J'étais dans mon lit, une personne à ma droite, personne à ma gauche. 

Je me suis endormie.

Quand je me suis réveillée, Le Bête était à ma droite.

Le mystère de comment il était arrivé là, complètement saoul, sans passer par la porte d'entrée reste - derrière "Quelle est, diantre, la vraie raison de ma rupture avec le Tinman ?" - le plus grand mystère de toute ma vie.

N'importe qui aurait pris ça pour un choix de sa part.
N'importe qui sauf moi.


samedi 1 septembre 2012

My sorry-ever-after [Part VIII]



Et puis, un soir, il y avait à nouveau une grosse soirée sur son campus. Il est venu me chercher en voiture. 
Dans cette voiture, ô surprise, il y avait une inconnue à côté de lui à l'avant. 

J'ai demandé à son BFF qui était cette fille, il m'a dit "notre nouvelle super pote, on l'a rencontrée il y a trois semaines dans un bar.".

Je ne sais pas où je trouvais cette naïveté, mais j'ai sincèrement vu de l'amitié potentielle dans cette fille, on s'entendait bien, on avait plein de points communs (le même prénom, la même origine, la même passion, la même couleur de cheveux...). 

J'ai mis un temps insolent à me rendre compte qu'on avait le coeur qui battait pour le même garçon. 

Elle moins. Dès qu'elle m'a vue danser avec lui, dès qu'elle a surpris nos regards dans les rares moments d'égarement où il me parlait en public, elle a compris.

Je ne saurais jamais ce qui a déclenché la guerre froide, je suppose que c'est quand il a choisi de dormir avec moi et pas avec elle. 

Le matin de mon déménagement, il a eu 2 heures de retard. Il m'a appelé, pour me prévenir - un peu tard - qu'il n'avait pas dormi de la nuit. Qu'il était avec elle. Toute la nuit. Mais dehors. Sur les quais. 

Quand il est arrivé, il avait des cernes de panda et des morsures sur tout le corps. 

Elle avait un peu trop clairement posé sa marque pour que je nie l'évidence.

Lors du dernier voyage vers mon nouvel appart', sa main est venue se poser sur le haut de mon genou, j'allais lui demandait d'où sortait cette marque d'affection quand il a commencé à serrer, serrer, serrer.

Je lui ai demandé d'arrêter, une fois, deux fois, trois fois.

Je me suis demandé ce que j'avais fait pour l'énerver.

Le déménagement fini, quand un de ses potes, qui nous aidait, lui a demandé "alors ça se passe comment avec ******* ?" il a écarquillé les yeux et lui a fait signe de couper court à la conversation. Mais j'avais tout vu, tout entendu.

Ma question était "pourquoi il se cache alors que nous ne sommes pas ensemble ?"

J'ai regardé mon genou, qui était déjà violet.

J'ai passé ma première nuit dans cet appart' avec lui. Puis ma première semaine. Puis c'était à se demander s'il avait un chez lui. 

De temps en temps, sans raison apparente, il me plaquait sur le lit et m'empêchait de bouger. Il a essayé de m'étouffer une ou deux fois. J'ai commencé à devenir bleu de partout.
Mais c'était pour jouer. Il ne connaissait simplement pas sa propre force.

Un week-end, j'avais une fête de famille, loin, très loin, dans la Normandie profonde. Après mes deux premières coupes de champagne, j'ai fait une crise d'angoisse. Je ne comprenais pas bien d'où elle sortait mais je savais qu'il se passait quelque chose d'affreux. 

Sur les coups de minuit, n'en pouvant plus, j'ai téléphoné. Il ne répondait pas. Une amie qui était avec lui a décroché et m'a annoncé que tout allait bien, sauf que la nouvelle amie de La Bête - qui n'était toujours pas officielle, elle non plus - s'était perdue et qu'il était parti à sa recherche. 

Je n'avais pas besoin qu'on me dise ce qui s'était passé. J'en ai eu la confirmation de la bouche de La Bête qui racontait l'histoire à ses amis, ignorant que j'étais là : il l'avait retrouvée, ils s'étaient embrassés pendant une partie de la nuit et il n'était pas allé plus loin.

Ca a été une sorte de déclic, et j'ai décidé de rencontrer quelqu'un. 
D'autre. 
Et je suis sortie entre copines.

Le lendemain, un dimanche, j'avais une dizaine de messages de lui me demandant ce qui s'était passé exactement. Sentant la fissure, je n'ai pu m'empêcher de rien lui dire - même s'il n'y avait vraiment rien à lui dire.

La discussion s'est envenimée à une vitesse vertigineuse et elle s'est terminée par lui me disant de ne plus jamais lui adresser la parole et que la seule façon pour moi de le contacter dorénavant serait la poste.

 N'importe qui en aurait profité pour s'échapper de cette relation.
N'importe qui, sauf moi.

vendredi 31 août 2012

My sorry-ever-after [Part VII]



Nous avons repris nos habitudes, chez l'un, chez l'autre.
Il a raté son avion, une fois, parce qu'il préférait faire la grasse matinée chez moi.

Il a proposé de s'occuper de mon déménagement. M'a demandé si ça me dérangeait, s'il venait dormir dans mon nouvel appartement, parce que ça l'arrangeait, pour son nouveau stage. 
Il a été le premier à avoir un double de mes clefs.

Cette situation inacceptable l'était dans ma tête car je devais m'en contenter, parce que je ne valais pas mieux. 

Pourtant, quelque chose avait changé, le chahut était devenu moins innocent, lorsqu'il laissait traîner ses mains sur moi, ce n'était plus pour me faire rire mais pour me pincer. Lorsqu'il me plaquait sur le lit ça n'était plus pour me faire rire, mais pour me faire taire.

Une nuit, quand il a fait le choix de ne pas revenir dormir chez moi, mais chez nos amis, j'ai acquiescé et j'ai souri.

Je me rappelle clairement avoir marché jusque chez moi. La place, silencieuse, froide, la pub illuminée de Nicole Kidman pour Chanel N°5.

Je me rappelle clairement qu'arborant toujours ce sourire, j'ai senti à chaque pas mon coeur se déchirer un peu plus.

La sensation exacte d'une feuille de papier que l'on coupe en deux très lentement.

Je pensais avoir touché le fond.

Mais...

Il y eut une soirée particulièrement critique dans notre historique de soirées critiques.

Alors qu'il m'ignorait à nouveau lors d'une soirée et que j'avais à peu près deux bouteilles de vin dans l'estomac, je l'ai vu danser avec son ex. Je savais fondamentalement qu'il ne se passerait rien entre eux, mais l'idée, la simple idée, qu'il puisse être avec une autre m'a fait basculer.

Au sens propre comme au figuré : je me suis laissée tomber en arrière depuis le podium où tout le monde dansait, une fois par terre, je les ai regardé une dernière fois et je suis partie en courant. 

Je cherchais dans ma tête de quel endroit de ce lieu inconnu je pouvais me jeter.
Il avait les clefs de son bâtiment. J'ai donc couru à travers les pelouses jusqu'à ce qu'on me plaque sur le sol. Il m'avait rattrapée - bien sûr. Il m'a hurlé dessus. Je me suis mise à pleurer. Il m'a serrée dans ses bras, plus fort que jamais, puis il y a eu un grand silence.

Il m'a dit "Je croyais que c'était fini."

Je lui ai répondu "C'est pas parce que c'est fini que ça s'arrête."

Quand je l'ai regardé à nouveau, une larme coulait sur son profil. C'était la première fois. Je ne me serais jamais imaginée qu'il en était capable. Je le sais très sensible mais aussi très doué pour tout cacher. 

Puis j'ai compris : ce n'était pas la situation. Ce n'était mon désarroi. Ce n'était pas cette situation étouffante, invivable.

Non.

Il venait, volontairement, de s'écraser sa cigarette sur la cheville.


N'importe qui aurait été horrifié.
N'importe qui, sauf moi. 

mercredi 29 août 2012

My sorry-ever-after [Part VI]

Il m'appelait le soir et me demandait ce que je faisais.

C'était simple : à part lui, à part eux, je n'avais pas de vie à Paris. Alors je lui répondais "pas grand-chose". C'était son code pour "je peux venir dormir chez toi ?".

Mon 10m² était l'appartement le moins praticable du monde pour deux personnes (dont un géant).

Des essais de cuisine ratés, de grandes discussions sur le gouffre qui nous séparait, sur ma différence, sur le fait que j'étais incompréhensible, beaucoup de musique, du vin, aussi, et s'endormir dans les bras l'un de l'autre. 

Bientôt, je suis devenue son +1 féminin officiel. Celle qu'il amenait un peu partout pour occuper ses soirées quand les autres n'étaient pas dispo. Car je l'étais toujours pour lui. Si je savais qu'il y avait une minime chance pour qu'il s'incruste chez moi un soir, je refusais tout autre plan.

Il m'a invitée à venir chez lui (même si, bizarrement, à chaque fois ses colocs n'étaient pas là), m'a fait la cuisine, m'a fait visiter son campus.

Nous étions toujours tous les deux, et, la partie la plus naïve de mon moi prenait ça pour une bonne chose. Je pensais que j'étais spéciale et qu'il aimait passer du temps rien qu'avec moi.

J'ai compris que je faisais fausse-route durant deux soirées, quelques semaines après.

La première était importante pour moi : l'inauguration du Salon du livre de Paris.

Tout a très bien commencé, il était plutôt content, de bonne humeur, l'alcool était gratuit.

Le ciel s'est assombri quand il a compris que je connaissais à peu près tout le monde. 

Il carrément commencé à faire la gueule après qu'on m'ait demandé, en le désignant "c'est ton copain ?"

La cinquième fois qu'on m'a posé la question, il est parti se perdre dans la foule. La personne a rajouté "si c'est pas ton copain, c'est pour bientôt !". J'ai eu un sourire triste et je suis partie à la poursuite de La Bête qui ne m'a plus adressé la parole de la soirée.

Je crois que c'était la première fois que je rentrais chez moi en pleurant par sa faute. 

La deuxième soirée était dans notre groupe habituel.

La préchauffe était plutôt très enthousiaste - et très lourde en alcool. Je m'étais contentée de rosé - mon signature drink de 18 à 20 ans. 

J'avais remarqué que je n'avais pas beaucoup parlé à La Bête ce soir là, mais je ne m'en effrayais pas. On avait tellement passé de temps ensemble qu'il me semblait normal qu'on respire chacun de notre côté.

Puis nous avons pris la route. J'ai embarqué une des bouteilles, car le chemin était long.

Dans le métro, sans rien me dire, sans me regarder, il m'a arraché la bouteille des mains.

Après un moment de stupeur (à l'époque, pour n'importe qui d'autre, m'arracher une bouteille des mains était une déclaration de guerre), je me suis levée, et j'ai tenté de récupérer mon bien.

Puis j'ai négocié "je te la rends après.". Il m'a repoussée, une fois, deux fois, la troisième fois je me suis pris une rangée de fauteuils (j'étais saoule, et maladroite). 

"Tu as confiance en moi ?" C'était une question rhétorique dans ma tête.

Il m'a jeté un regard de dégoût et a tourné les talons.

Je suis restée les yeux grand ouverts, accrochée à mon sac, et j'ai commencé à comprendre.

Pour je ne sais quelle raison le groupe s'est séparé en deux, et j'ai choisi celui où il n'était pas. Je me suis mise à pleurer en silence. 

Quand le groupe s'est réuni, à l'entrée de la boîte, il m'a à nouveau attendue et attirée à l'écart.

Son regard était noir, ses gestes brusques, ses mots durs. Il m'a hurlé dessus. Le message était que je n'avais pas le droit de me mettre dans cet état là pour lui. 

Le sous-texte, je l'ai pris en pleine figure quand un de ses potes est sorti de la boîte pour lui dire "La serveuse que tu veux pécho est là, qu'est-ce que tu fous ?"

J'ai compris, j'ai séché mes larmes, je suis entrée. J'ai gâché la soirée de la plupart des gens ce soir là. Jusqu'à ce que sa serveuse lui colle un troisième râteau et qu'il finisse dans mes bras. Dans une salle à part de tous nos amis.

Le serrant contre moi, j'ai accepté d'être la fille de l'ombre. Celle avec qui il ne voulait pas être vu par ses amis. Par personne d'important. J'étais la fille d'entre quatre murs. 

Il avait honte.


N'importe qui avec un minimum d'amour propre l'aurait envoyé chier.
N'importe qui, sauf moi.