dimanche 23 février 2014

Got to make sure that my life will be great



Je crois que je passe 80% de mes journées à retenir ma respiration et à ne pas cligner des yeux, de peur que tout cela s'envole.

Ce calme. Cette tranquillité. Cette stabilité. 

De peur que le chat, l'appart', les promesses de lendemain lumineux s'envolent en un clin d'oeil comme c'est arrivé il n'y a pas si longtemps.

Pour autant, la peur de perdre ce que j'ai n'est pas handicapante. Elle ne m'empêche pas d'avancer.

Je vis tout comme dans un rêve très opaque. Ce genre de rêves où il reste une petite partie de libre-arbitre. Où l'on arrive à diriger ses actions dans un environnement pourtant surréaliste. Ce genre de rêve où on se dit "Et si je faisais ça ? On s'en fout, c'est un rêve !".

C'est dans cet état d'esprit brumeux que j'ai recommencé à écrire. ON NE HURLE PAS. Je vous vois arriver avec vos gros sabots, la fanbase là-bas, oui, vous deux, c'est bien à vous que je parle. 

On ne s'emballe pas. 

J'ai gagné mon pari avec moi même. Ma remise en forme des dix doigts. Commencer à écrire à des gens, pour avoir une sorte de culpabilité cuisante si jamais je ne le faisais pas. Puis retrouver un rythme de publication ici et sur l'autre blog car, là encore, il y a une attente relative qui me permet d'avoir une motivation certaine. Et enfin, occuper mes journées de chercheuse d'emploi à de l'archéologie de mes textes.

Le fait est que j'ai 15 débuts de roman tous plus brillants les uns que les autres. Ca, c'est mon oeil d'éditrice qui le sait. Mon oeil d'auteur, lui, sait très bien que c'est perdu d'avance car ces textes sont morts dans ma tête. Je serai incapable de les poursuivre. Les personnages ne prennent plus vie dans le background de mon esprit et l'imagination n'est pas là. Comme j'ai fait l'erreur de ne pas écrire de plan détaillé, je ne peux pas attaquer l'iceberg par un autre morceau. Je dois donc me faire un deuil, pour le moment. Pour certains textes dont le potentiel a été repéré, par vous, par d'autres, et accepter que le texte que je retravail dans sa version finalisée (!), soit celui qui ait sûrement été le plus démoli par mes critiques de confiance.

Car il est terminé. C'est un des seuls de mes romans menés à biens. Un texte dont l'idée m'est venue en 2006 et dont le premier jet a été achevé lors de mon année de licence, entre 2008 et 2009. Le temps de repos a été long. J'ai commencé le tome 2 en cours de route. Et je me suis dis, damned, le potentiel de divertissement de ce truc est tel qu'il me divertit moi-même. Ca n'est pas rien. 

Alors voilà. J'ai édité 112 pages sur 150. Je prévois d'apposer la dernière touche la semaine prochaine et j'ai une liste toute prête de 5 éditeurs dans les lignes édito desquels ma prose pourrait rentrer. 

Si la réponse est négative, j'aurais tenté. Si la réponse est positive, moins que la publication (qui ne m'impressionne plus du tout maintenant que j'ai vu comment ça se passait de l'intérieur), j'attends qu'on m'attribue un éditeur à moi, l'éditrice, quelqu'un d'extérieur payé pour me mettre des coups de pieds au cul et me forcer à bûcher sur mes plans et mes projets laissés pour morts. 

C'est super sain non ? On dirait presque que je sais où je vais. 

J'observe les gens mettre de l'ordre dans leur vie et ils m'inspirent. Je ne reste pas les bras le long du corps à me dire "si seulement ça m'arrivait à moi aussi.". 

I'm in a good place and I love every minute of it.

mercredi 19 février 2014

It kicks like a sleep twitch




– Essuie tes... euh Van's avant d'entrer.
– Comment ça se fait qu'on peut porter des talons ?
– On s'est fait opérer, dans trois ans pour toi. 
– Putain c'est chanmé. C'est vraiment chez nous ?
– Hum oui. 
– Et y a pas nos parents, je veux dire, c'est que pour nous ?
– Pas exactement non. Mais je te confirme qu'on ne vit plus avec les parents depuis un bon bout de temps. L'année prochaine, pour toi.
– Et donc on vit avec... OH PUTAIN UN CHAT NOIR !
– Marlowe. Mais ça fait pas longtemps. Et j'hésite à l'échanger avec un poisson rouge.
– Attends nan mais il est bien mieux que Lucifer. Y a pas photo. Il est tout petit, il a plein de poils, il...
– Aucun chat n'est "bien mieux" que Lucifer.
– Il est où au fait ?
– ...Tiens t'as vu tous les autographes que j'ai qu'ils sont beaux hum ?
– OMG. Carl ? Carl Barât ? AAAAAAAAAAAaaaaaah. Mais putain c'est qui We are scientists ? Et pourquoi ils sont partout ? PHOENIX ? PHOENIX ? PHOENIIIX ?
– Tu comprendras plus tard. Installes toi, tu veux un café, une bière ?
– Euh... NON ? Tu BOIS ?
– Festivement... 
– Et tu fûmes aussi ?
– AH CA NON.
– Et... les garçons ? Je veux dire est-ce que ça y est on a... ?
– Premier baiser l'année prochaine pour toi. Arrête de désespérer
– Non mais est-ce qu'on aaaa... Je veux dire... Tu saiiiis...
– Bah écoute oui, mais te connaissant, si je te raconte, ça risque de te faire entrer dans les ordres et on est bons pour créer un paradoxe temporel.
– Et t'es toujours avec lui ? 
– Avec elle, tu veux dire... Non, jdéconne. Ecoute, y a du mieux dans notre vie sentimentale, mais on est toujours de grosses attardées. J'ai tout fait pour essayer de rattraper le temps perdu mais on a un gros problème de timing et puis le dossier "confiance en soi" a mis du temps à être bouclé, donc nous voilà, à bientôt 26 ans, complètement célibataires, mais à peu près sûres de nous.
– C'est quelqu'un du lycée ?
– Hein ?
– Le type. Tu sais. Le premier.
– Alors 1) little Johnson, tu vas arrêter deux secondes de focaliser sur les premières fois, ça ne nous amènera jamais rien de bon et 2) du lycée tu ne garderas qu'une amie et quelques connaissances lointaines, tu n'auras jamais le petit ami tant espéré avec qui partager tes cappuccinos à 30cts et tu ferais mieux de te concentrer sur tes études.
– Dis moi qu'on a eu une mention.
– On a eu une mention.
– Et comment ça s'est passé la prépa ? J'ai été acceptée dans une grande école ?
–... On n'est pas exactement allées en prépa.
– On est entrées direct à la Sorbonne ?
– On a... pris un parcours plus professionnel, beaucoup bu avec des garçons barbus, puis avec des garçons moins barbus et seulement après on est entrées à la Sorbonne.
– Putain on l'a fait. ON L'A PUTAIN DE FAIT.
– Alors par contre, je comprends pas comment à presque 26 ans je me fais tout le temps allumer par Maman pour mon langage mais que toi rien-à-foutre.
– De toute façon on se parle pas, alors elle peut pas savoir.
– Oui bah de ce côté-là...
– Nan mais c'est chiant. Parle-moi de ton boulot !
– AHAHAHAH. Tu poses de supers questions. Toujours au bon moment. Si tu n'étais pas moi, je te fuirai comme la peste.
–  On est au chômage ?
– On focalise notre recherche d'emploi sur un dreamjob qui met du temps à venir à nous. Mais on est en lice. Mais on en sait pas plus. Mais on y croit. Parfois. Entre midi et deux. Quand on se lève.
– Et on est toujours amies avec... 
– Non.
– Personne ?
– Si, pour être honnête, de temps en temps, on en revoit quelques uns, mais "ami" est un grand mot. On a beaucoup changé.
– Mais non ! On a toujours le même blog, un chat, et une armoire remplie de livres de vampires, d'ailleurs c'est quoi ça Twilight, ça a l'air pas mal ?
– C'est ce qui te permettra de faire un mémoire de fin d'étude où tu t'éclateras la rate en parlant de tout ce que tu as lu pour ton plaisir depuis que tu sais lire, mais sinon, ça n'est pas très intéressant, non. 
– Mais on aime toujours la musique, les livres et les jolis garçons, alors qu'est-ce qui a changé ?
– Nous n'avons plus aucune morale. C'est très récent. Mais c'est fantastique à vivre.
– Oh ?
– On a arrêté de se laisser marcher dessus, d'ailleurs c'est pour ça qu'on est en recherche active d'emploi en ce moment.
– On s'est jamais laissées marcher sur les pieds.
– C'est vrai. Maintenant que tu me le rappelles, je pense que je suis revenue à ton niveau de rébellion et de défense de l'opprimé.
– On est toujours végétariennes hein ?
– Carrément.
– Donc à part le fait qu'on est n'est plus si coincées que ça, qu'est-ce qu'il s'est passé ?
– Little Johnson, à l'heure où je te parle, tu n'as encore jamais eu le coeur brisé...
– ...Si, il y a...
– Non. Je te promets. Ca va arriver. Plein de fois. Plein de fois très différentes. Parfois à cause de toi, mais parfois il faudra surtout que tu gardes en tête que ça n'avait rien à voir avec toi, que tu n'aurais rien pu faire et qu'il y a certains garçons qui sont justes mauvais, d'accord ?
– Autant rester seules alors.
– Tu en reviendras de ça.
– Putain tu me gaves à tout savoir mieux que moi.
– Oui ben en même temps je suis plutôt bien placée.
– On a publié un livre ?
– On a publié plein de livres.
– Non mais, des à nous ?
– No. 
– On n'est pas assez bonnes ?
– On n'est pas assez... On n'a... On... On n'écrit plus.
– Mais qu'est-ce qu'on fait de nous journées ?
–  Alors il y a eu la phase "regarder le mur dans le blanc des yeux", longtemps, puis celle, plus agréable de "dormir beaucoup" et enfin, maintenant on fait un mélange de tout ça avec le chaton pour excuse et le secret espoir qu'un jour quelqu'un se réveillera et viendra littérairement nous botter le cul en mode sparing partner.
– Je suis pas sûre d'être contente de ce qu'on est devenues.
–  Je peux comprendre. De mon point de vue, je suis rassurée d'avoir tout ça derrière moi. Je suis contente qu'on ne soit plus malheureuses.
– What ?
– Bah c'est déjà beaucoup et...
– ...Non mais t'aurais pas pu commencer par là ?
–  Enfin, ça ne se voit pas ?
–  Bah non. Tu sais bien qu'on sourit jamais. En plus maintenant t'as des rides.
–  Alors euh, non. C'est des rides d'expression et les cheveux blancs c'est à cause du stress de mon ancien job...
–  Mais genre on n'a plus d'idées noires ?
–  Plus trop non. Ca arrive parfois, mais ça part très vite.
–  Plus de médicaments ?
–  Ah non. Plus depuis 6 mois. Et on gère très bien.
– Woah.
–  Je sais que tu t'attendais sûrement à autre chose. Que pour toi, il faut tout avoir ou rien. Mais c'est déjà pas mal. Vraiment. Il faut apprendre à apprécier ce qu'on a.
–  JAMAIS JE ME CONTENTERAI DE PEU.
–  Mais puisque je te dis que c'est BEAUCOUP ce qu'on a. C'est la crise tu sais.
–  C'est quoi ça "la crise" ?
–  Ahahah. Tu verras, c'est sympa. C'est comme un gros paravent qu'on agite et qui est devenu notre emblème mondiale.
– Est-ce qu'on a rencontré Andreas Johnson ?
–  Tu me mets mal à l'aise parfois, tu le sais ça ?
–  Bah il est toujours sur ton mur.
–  Tu me mets mal à l'aise, parfois, mais jamais je ne te renierai. Et je continuerai d'honnir tous ceux qui t'ont fait du mal. 
–  Mais plus personne va me faire du mal, le collège est passé.
– ...
–  Ca va recommencer au lycée ?
–  Ca sera là toute ta vie. C'est juste que ça fera moins mal. Parce que tu seras armée. J'ai veillé là-dessus.
– Mais on peut pas vivre comme ça, avec ça et ce...
–  On peut vivre dans à peu près toutes les situations. Je te promets.
–  Mais on n'a jamais eu de courage.
–  Non, mais on a de la volonté. Et arrête de dire "mais" à tout bout de champ.
– Donc en conclusion, ce blog que j'ai ouvert un soir où je m'ennuyais était peut-être la meilleure décision de ma vie ?
– La principale décision de ta vie, oui. Ca a généré énormément de choses. On n'est toujours pas sûres d'où on se situe par rapport au positif et au négatif du truc mais on y réfléchit.
– On réfléchit toujours trop.
– Oui mais moins.
– Donc tu es moi "oui mais moins".
– Voilà. En gros.
– En tout cas chouette chaise violette.
– Je savais que tu kifferais.
– Mémé elle doit pas aimer du tout, elle si ? Elle va comment ?
– ...Tu re-veux un coca ?

samedi 15 février 2014

I'm all in, it doesn't matter what this is

[Aaaawwww]

J'ai complètement buggé. On m'a posé une question simple pourtant : "Et toi Johnson, c'est quoi ton genre de mec ?". 

Hum.

C'est pas comme si j'avais 10 ans de blog ici et 3 sur celui d'à côté où je dissèque cette notion.
Le fait est que je n'avais aucune réponse à formuler.

Et pire que ça : je ne sais plus qui je suis.

Oh.My.Gosh.

Et non, pas de crise existentielle. Pas de terreur universelle.

Juste une vague flemme de devoir reconstruire une carrière si jamais je n'étais plus éditrice.

A part ça : la gamine qui rêvait depuis toujours au grand amour et qui espérait qu'un jour, enfin, on pourrait l'aimer en retour (=> vomir ici), est bien décédée, ainsi que son petit coeur tout mou, quand il a fallu devenir adulte, il y a un an de cela. 

Le grand rêve romantique débile qui m'a poussé à ouvrir ce blog il y a si longtemps est enterré très profond. Plus de signe même qu'il puisse revenir à la vie.

A la place, il y a juste une sorte d'envie immarcescible de profiter de chaque instant, puisque tout lâche. 

Les anévrismes. Les freins d'une voiture. Les nerfs. La planète.

J'étais une personne mesurée et très propre, dans sa morale, ses convictions et ses buts dans la vie.

Je suis devenue une sorte de monstre aux lèvres rouges et aux yeux injectés de sang, qui titube le jour et agrippe la nuit des tas de gens dans sa toile. 

Je me nourris d'inconnus, de leurs histoires, de leurs collisions avec ma comète. Ils sont autant d'histoires qui arrivent encore à m'émouvoir, quand tout le reste n'est qu'un jardin desséché. 

J'ai une vie confortable. J'ai réussi à mettre ça de côté. 
Mon cerveau, lui, jette toujours des regards noirs à cette époque où je me suis laissée aller à espérer dans les bras d'un garçon qui me donnait toute raison de croire que lui aussi.

Je pense qu'il ne se laissera plus jamais avoir. 
Par fierté sûrement. 

L'amour m'a guidée dans tous les panneaux, m'a jetée dans tous les escaliers, m'a enterrée dans tous les fossés qu'on a rencontrés. 

Je crois que je l'ai laissé dans une de mes étagères. Entre le Titanic et Oscar Wilde. 

Je crois que mon nouveau guide est ma sacro-sainte liberté. Celle que j'essuie bien dans la gueule de qui tente de me dire "bah non, faut pas faire ça !". 

Depuis longtemps, je deviens violente si jamais on m'empêche de passer lorsque je veux aller quelque part et que je suis dans un état de nerf/d'ébriété/de tristesse certain. J'ai toujours été cette Johnson. 

Je la suis juste un peu plus pleinement maintenant. 

samedi 8 février 2014

Feel love before it's gone


Ce blog devient Proustien. Régulièrement, des gens qui m'aiment beaucoup fort - il faut au moins ça - me disent qu'ils en ont commencé son ascension et qu'ils ont décide de le lire intégralement.

Bon, ça n'est pas possible pour des raisons techniques et parce que mon évolution bloguesque ressemble à celle du personnage principal de Des fleurs pour Algernon, j'ai dû mettre des cadenas sur les plus vieilles publications.

Dans ce magma improbable de mots, de sensations et de détricotage de sentiments, pourtant, il y a peu de notes où j'évoque un moment de calme et d'almost pleinitude. 

Alors je voulais laisser une trace, ici, du fait que ma vie est très tranquille, en ce moment. 
Dans le bon sens du terme.

Le chaton tient son rôle d'antidépresseur naturel. Tous les amis ou presque sont revenus au bercail et je ne suis plus jamais seule quand j'en ai pas envie. Johnson de 20 ans serait jalouse. 

J'arrive à être fondamentalement heureuse des choses positives qui arrivent à mes amis. J'arrive à me sortir le nez de mon nombril et surtout, j'ai compris tout récemment que je préférais par dessus tout être avec d'autres êtres humains plutôt que seule quand le choix s'imposait à moi. 

C'est un paramètre de plus qui me dissocie de tout un groupe d'amis. Même à bout, stressée, fatiguée, hors d'usage, j'irai au bout du monde pour voir mes amis. Je pensais avoir trouvé la clef en m’étiquetant "Introvert" mais je suis un être bien plus complexe.

J'élis des gens. Et j'agis avec eux comme avec mes idoles. Je suis capable de tout. C'est peut-être pour ça qu'on tombe très rapidement en disgrâce dans mon royaume, car si quelqu'un ne voit pas ça ou traite cette relation comme de seconde zone, ça ne peut plus durer.

J'attends qu'on me traite comme je traite les gens. L'équilibre est là. C'est très exigeant, parce que je suis une folle furieuse du "soyez heureux" "souriez bordel" "mais vous allez vous amuser oui ou merde ?". Je pensais ne jamais y arriver, et pourtant, avec un peu de patience et de compréhension, de connaissance de l'autre, j'arrive à maintenir cet équilibre, ce cercle vertueux même, avec une poignée de gens magnifiques.

Mes notes sont chiantes quand elles sont positives. C'est sûrement pour ça que je vais me remettre à me plaindre dès la semaine prochaine.

En attendant soyez contents pour moi. 
C'est rare et précieux. 

mardi 4 février 2014

I didn't walk how you said i should walk, i walk how i do walk, and that's fine


Nowadays, ma vie est très très épistolaire. 

Je lis des lettres, beaucoup. Aussi bien celles qui me sont adressées que celles de grands auteurs.

Mon livre préféré est De profundis après tout, et vous n'allez pas me la faire à l'envers, j'aime ce qui est personnel. J'aime ce qui est adressé. J'aime quand l'autre sait à qui il parle.

Je sais toujours à qui je parle quand j'écris. 

J'ai reçu une carte postale aujourd'hui. Je me suis fait la réflexion de la perte de vitesse de ce média. Le SMS d'autrefois, un peu. J'en ai un paquet dans mes cartons, et j'ai hérité de celles que j'avais envoyé, toute ma vie, à ma Mémé. 

Ce sont des polaroids, aussi. Rien à voir avec ce que j'écris, en ce moment, quand j'écris à quelqu'un. 

Je vais loin, je creuse. Je blogge en mode #off. Je non-censure encore plus qu'ici (si si, c'est possible). 

Je me moquais doucement d'un ex à moi qui me confiait écrire des lettres manuscrits à son meilleur ami, qu'il voyait pourtant tous les jours. Pour moi, à l'heure du mail, dépenser de l'argent et de l'énergie à s'écrire sur papier était tout à fait ridicule.

Je commence à le comprendre maintenant.

S'écrire, prendre le temps de le faire longuement, en développant, c'est l'antithèse de l'écrit journalier qui nous envahit, celui de feu MSN, de Facebook et même des mails qu'on s'envoie professionnellement. 

La différence est l'intention qu'on y met. L'investissement. A quel point on s'offre à l'autre. A quelle hauteur on lève le rideau de son existence quand on lui adresse quelques lignes.

Les dialogues parlés, dans ma vie, sont très vides. Je cherche le sens ailleurs. C'est de là que vient sans doute cette impression tenace que j'échange plus avec un groupe de rock qui travaille un minimum ses paroles qu'avec tout un tas d'amis qui ne dépassent pas le "Salut ! Ca va ?" quand on se voit une heure trente tous les mois. 

S'écrire c'est aussi avoir un historique à disposition, dans lequel on peut fouiller plus sûrement que dans n'importe quelle mémoire. 

Pourquoi je vous barbe avec ça ? Pourquoi ce soir spécialement quand ça fait des plombes que ce sujet fait partie intégrante de ma vie ?

Parce qu'hier je me suis isolée dans un lieu qui me calme, à Paris, et je me suis isolée avec un livre presque pris au hasard, dans ma bibliothèque d'Alexandrie personnelle. 

Lettre au père de Kafka. Dans l'appendice de cette édition très chère à mon coeur, ramenée de Prague, était cette citation :

"La grande facilité d’écrire des lettres doit avoir introduit dans le monde - du point de vue purement théorique - une terrible dislocation des âmes : c’est un commerce avec des fantômes, non seulement avec celui du destinataire, mais encore avec le sien propre ; le fantôme grandit sous la main qui écrit, dans la lettre qu’elle rédige, à plus forte raison dans une suite de lettres, ou l’une corrobore l’autre et peut l’appeler à témoin. Comment a pu naître l’idée que des lettres donneraient aux hommes le moyen de communiquer ?"

En gros, Kafka dit qu'écrire à quelqu'un c'est bloguer. Je pense que Kafka aurait été un insupportable blogueur. Un petit chouineur chétif limite troll. Il a eu du bol d'avoir un père abusif, quelque part. Ca a produit chez lui une oeuvre quand, chez moi, ça n'a fait que créer un blog suivi par une quarantaine de personnes les grands jours. Je crois aussi que son esprit malade et le mien ne sont pas si éloignés. Je dis ça pour ses mésaventures amoureuses, sa relation exclusive avec Prague et sa propension à se lier d'amitié avec des êtres excentriques qu'il aime par dessus tout.

Franz et moi, on est semblables sur beaucoup de points, et j'écris beaucoup de choses qui pourraient faire partie de son spectre. 
Finalement, c'est peut-être à lui, que je devrais écrire.