dimanche 17 avril 2011

Last Night

Il y a des nuits comme ça.

Il y a des nuits purgatoires. Où tout ton stress doit s'évacuer. Le stress d'une vie, en quelques heures, au coeur de la nuit.

Two great friends, both alike in dignity,  In fair Rotomagna, where we lay our scene

Hier était une nuit où l'alcool a fait son effet. Pas assez pour me rendre hors d'état de tout, assez pour me mettre dans cet état entre deux mondes, où l'on est dieu.

Où l'on peut tout dire.

Et surtout à un garçon croisé au hasard, combien il est beau.

L'alcool révèle la beauté des choses, et, passant sur la place de la cathédrale de Rouen pour rentrer, je me suis stoppée nette. Pas en adoration devant un signe extérieur de déité, mais devant un monument à couper le souffle, qui me fait l'honneur de croiser ma route à un moment de ma journée où je suis trop épuisée pour articuler "ca-thé-drale" et qu'il m'est plus aisé de la rebaptiser Tour Eiffel.

Je rencontre une Louise, aussi, et tente de la convaincre que son prénom est merveilleux. 

Je suis allongée sur cette place qui date de cinq siècles et j'aimerais absolument faire passer ce que je ressens à mes compagnons - tout en sachant que cette mission est impossible, au plus haut point.

Même une âme sœur ne pourrait être à l'exact même point de ma vie. Rares sont les moments d'unisson, mais je ne peux m'empêcher d'inlassablement les chercher.

Alors on parle de mon chat mort, de maladie mais aussi de courir après ce joli garçon, pour qu'il reste un peu plus longtemps dans nos vies.

Mes amis perdent patience et ne sont pas dans un état second, juste eux mêmes virgule cinq, tout au plus.

La cathédrale est belle et je lui dis. Et je leur dis. Je veux les persuader, comme si mes mots pouvaient changer quoi que ce soit.

Mais m'exprimer à l'oral, surtout alcoolisée, n'a jamais persuadé personne.
Alors je suis la seule, à me souvenir de la couleur du ciel, des rares nuages, du calme, du confort inattendu des pierres et pavés dans mon dos, du violet des tours et des lumières finement reflétées.
J'ai ressenti ce que Monet a ressenti, la frustration en plus de savoir que jamais je ne pourrais le transmettre comme il l'a fait.

vendredi 15 avril 2011

Oh doctor, doctor...

Depuis le diagnostic, c'est comme si j'avais été estampillée FRAGILE, comme ces gros cartons de déménagement.

Comme si on m'avait dit "Aussi fort que tu essayeras, jamais tu ne parviendras au bonheur."

Voilà, je pourrais être un vampire avec une âme donnée par une malédiction gypsy et je pourrais coucher avec toutes les chasseuses du monde sans problème.

Cette sensation se mêle à d'autres : celle d'avoir comme une envie de remonter en arrière, quand j'étais prise de crises de je-savais-pas-quoi-à-l'époque et jugée un peu rapidement par mes "amis".

Celle de ne plus pouvoir faire partie du troupeau, puisqu'il est bien connu que les animaux malades sont laissés sur le côté - mais, après tout, ils avaient fait le tri tout seuls.

L'impression qu'ils savaient tous avant moi, que ça se sentait.
Parce que tout autour, depuis des années, se sont rapprochés et réunis des gens qui ont la même chose.

Je ne m'étais jamais vraiment posé la question. Ou si. Pour écarter tout de suite la possibilité d'être malade.

Parce que je ne suis pas une fillette, et que je pensais qu'en se concentrant très fort on pouvait écarter les plus grands maux d'un geste de la main.

Je suis restée le gamin qui se déguise en Darth Vader.

Dernière sensation, celle de l'explication finale de ma différence et de ma solitude. Bizarrement, aucun soulagement ne l'accompagne. Seulement une envie de réécrire l'histoire. De se sentir un immense gâchis de viande humaine. Une pâte à modeler qui aurait pu donner quelque chose de fun, cool, hype et qui a merdé en chemin.

Et maintenant, il va falloir prendre les décisions qui s'imposent - ou qui ne s'imposent pas. Réfléchir à si je suis capable ou non de dire "fuck j'aurais une vie normale" encore longtemps avant de craquer. Ne plus rentrer en métro au bord des larmes.

Choisir entre le port d'un masque de fer éternel (même si la loi est contre moi) ou la discussion/prévention et essuyer d'autres "mais t'es contagieuse ?" réflexes.

lundi 11 avril 2011

Forget

Quand on travaille à plein temps dans un bureau, les week-end prennent des airs de vacances.

C'est ce que je me suis dit, entre deux balades au Père-Lachaise, assise dans un bar de la rue du Repos. 
Le temps d'un coca-citron-glace, se retrouver hors du monde, à deux, parler de rien. De garçons. De la hauteur du bar et de si je pourrais éventuellement y tenir debout. 

Pas de chat dans le cimetière - trop de monde, trop chaud - mais une rose, à mi-chemin entre le retard et l'avance, sur la tombe d'Oscar. Je répète mes flâneries mais je change de partenaire. L'été, je préfère y être accompagnée. L'hiver, seule. 


Je repère d'autres détails, je me dis que je ne les verrai jamais tous. 

Je ne pense plus à ma semaine en deux temps, mi-affreuse tout le jour, mi-apaisante une fois que je retrouvai ma coloc' d'un temps. 

Les mauvaises nouvelles en pagaille, je n'y ai presque pas pensé, alors que j'ai passé mes heures de boulot à fixer un écran en me concentrant pour que rien ne déborde. Ni colère, ni peine. Parce que je suis malade et que j'aime pas.

Une semaine qui s'est terminée sur un anniversaire improvisé, une soirée m'ayant permis de réaliser que plus que jamais, les filles forment le noyau dur de ma vie, que je peux compter sur elle, alors que je passe mon temps à penser à des garçons girouettes, filant plus vite que le vent et n'ayant aucun sens du give-back.

Des cadeaux en pagaille - UN PONEY. ENFIN. 

Des cadeaux qui prouvent que mes amis me connaissent mieux que ma famille, mes goûts, mes vices, etc.


Une soirée réussie, pour une fois. Avec une retrouvaille qui fait particulièrement du bien. Du genre qu'on a besoin de faire pour voir à quel point on a évolué.

Un dimanche soir calme où le blues ne m'atteint pas. La fatigue vient toute seule. Je dors. Je dors sans attendre des heures. Sans entendre chaque voisin encore éveillé. 

Deux résolutions, enfin : celle de dire (encore) plus souvent Fuck You, et celles de me remettre à écrire, parce que rien d'autre n'importe, dans ma vie principalement.


samedi 2 avril 2011

Ready


Je suis une lectrice bad-ass

Lectrice pour la plupart des gens, c'est un hobbie, pour moi, avant de trouver un boulot à temps-plein, c'était mon statut, ma wild card pour rester un pied dans l'édition et l'estomac remplit. 

Je suis devenue indispensable pour deux ou trois boîtes qui me courent après maintenant que mes 39h m'empêchent d'assurer un rythme de croisière. 

Londres approche.

Non, ça ne veut pas dire que la Grand-Bretagne s'est subitement décalée sur l'axe de la Terre.
Ca veut dire que dans pas longtemps tout le gratin de l'édition européenne et plus si affinités va se retrouver pour faire une vente aux enchère géante de leurs poulains. 

Et moi, je suis là pour tout le travail de repérage, je checke les bestiaux les plus prometteurs en langue anglaise et je dis sur quoi il faut miser gros, moyen ou pas du tout. Je suis un peu un trader du livre.

Mon day-job c'est comme l'usine de montage, des textes qui se ressemblent tous, que je ne traite que sur la forme, sous les ordres de gens qui veulent que ça aille toujours plus vite, produire plus, toujours plus. Je suis une petite main.

Mon night&week-end job, c'est la reconnaissance littéraire de personnes que j'estime. Car, comme tous les gens qui influencent dans le choix de "se fera, se fera pas", je suis dans l'ombre. Celui qui achète un livre ne se dit jamais qu'il y a une gamine de 23 ans qui, derrière son ordi, a pondu un texte word dépassant rarement la page, sans qui il n'aurait pas l'objet dans les mains.

Je compte. Je suis utile. Payée double dans l'urgence.

En droits d'auteur.

Ce qui, pour quelqu'un qui vient de s'apercevoir qu'elle n'avait pas pondu une ligne depuis 1 an - une longue année sans face to screen avec un traitement de texte - est d'une ironie que je ne commenterai pas.

Mes lectures me payent de quoi me déguiser en parisienne et faire semblant d'être comme les autres. D'appartenir à la grande famille du livre, la grande famille des djeunz branchouilles, la grande famille des réseaux sociaux, la grande famille de ceux qui haïssent la ligne 12 presque autant que la ligne 4, etc.

De bière salvatrice en bière salvatrice je remets à plus tard la confrontation avec moi-même. J'attends qu'on vienne me mettre des baffes pour me faire avancer, remettre les mains dans le cambouis de mon art qui a moisi dans l'ombre de mes fausses occupations prétendument importantes. 

Me mettre des baffes comme je sais si bien en mettre.