mercredi 15 janvier 2014

After my heart


[Ma vie sentimentale (et vice versa)]

La vie est dure. 

Aussi dure que le regard d'une personne qui vous hait. Qui vous hait parce que vous êtes. Parce que vous respirez pas loin d'elle et que rien que ça, c'est la goutte d'eau. 

En 2013, on m'a beaucoup détestée. 
Une telle récolte n'était pas arrivée depuis mes années collège. Ceux qui y étaient le savent : j'étais la lie de la société prépubère et je dois toujours faire un roman post-apo de cette période racontant ce que j'aurais pu devenir après m'être fait caillassée, humiliée et brisée dans tous les sens quotidiennement.

Bon. 
Bah mon année 2013 ressemble à ça. 

Je ne parle pas de broutilles. D'amitiés qui se défont. D'engueulades passagères. De ruptures ou de quiproquos. Non.

J'ai été persécutée, harcelée et intimidée. J'ai perdu ce qui m'était le plus cher à cause de ça, et, pour couronner le tout, on m'a demandé de signer un joli papier m'interdisant de l'ouvrir à ce sujet.

Moi.
Moi qui dit tout.

Moi qui dit à mes amis de ne jamais me confier de secret. Que le mieux que je puisse faire, c'est de ne le répéter qu'à une personne. Généralement je choisis quelqu'un de loin, qui n'en n'a rien à faire, mais quand même.

Je tiens ce blog depuis 10 ans. 

DIX ANS.

Dix ans +1 jour.

Le 14 janvier 2004, à 22h25, je postais, sur 20six, ma première note de blog.

C'était pathétique, anarchique, erratique. C'était bien.

Je suis d'une génération hyperconnectée où tout se sait, tout se dit, où les barrières de la morale et de la parole s'effondrent.
C'est ici que j'ai commencé mon apprentissage. C'est ici que j'ai fait état de mes conquêtes du monde réel. 

C'est ici que je ne pourrai jamais expliquer en détail pourquoi l'emploi va mal et à quel point j'en suis témoin.
Pourquoi je me suis fait virer parce que j'ai osé être une fille qui n'a pas su se taire. 
Remarque, j'aurais pu arrêter cette phrase à "parce que j'ai osé être une fille".

Cette génération est encadrée et employée par une génération qui n'a aucune idée de ce que c'est que d'être né avec les nouvelles technologies. Ils sont une race d'acquis quand nous sommes les premiers à être innés

J'étais la meilleure pour ce job, c'est pour ça que je l'ai décroché. C'est pour ça qu'on m'y regrette. C'est pour ça que je n'aurais jamais dû le perdre.
Pas pour ça, pas comme ça. 

Je touche aux limites de ce que j'ai le "droit" de dire, mais rien ne m'empêche de parler de mon ressenti, alors le voilà :

Je regrette avant toute chose que la misogynie ait gagné - et haut la main avec ça - auprès de personnes que je pensais fondamentalement-farouchement-fièrement féministes, et dans le sens constructif du terme.

Et je regrette de m'être trahie. Pas en faisant ce qui m'a été reproché. Pas en protestant devant les tentatives de déstabilisations qui ont mené à ma perte. 

Mais en signant ce foutu papier.
En rognant sur ma liberté d'expression. 

C'est mon grand combat, dans la vie : faire entendre des voix. La mienne en fait partie. 
Mon métier c'est d'entendre, c'est de lire, c'est de voir, au sens structuré et décisionnel du terme. 
Je ne suis pas une sainte et encore moins quelqu'un de fondamentalement gentil et positif, mais je suis un rouage de la démocratie. 

En acceptant de laisser un peu de ma liberté alors qu'on me la rendait, je me suis reniée. 
C'est une trop maigre consolation que de savoir que, finalement, personne n'a gagné dans cette histoire. 

J'entre dans cette nouvelle décennie avec une seule certitude, et une seule réponse à la question "qu'est-ce que tu fais dans la vie ?" : je m'exprime.

Et je suis libre de le faire. Et j'espère ne jamais plus laisser personne me faire taire. 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Veuillez écrire un truc après le bip visuel : BIP