mercredi 25 février 2015

Dreams we'll never be in



Parfois il y a un truc que je ne digère pas, et rien à faire.
Pas de pilule magique à avaler.
Ce que j'ai à digérer est dans ma tête, dans mon système nerveux, pas digestif. 

Ca fait trois mois que je ne sais pas dans quelle position me mettre pour atténuer la douleur. Mon corps entier se crispe. Tout le côté droit - le plus faible - et paralyse finalement une main plus bonne à rien. Je psycho-somatise comme une championne.

Je sais ce qui bloque. Je ne sais pas comment le débloquer. 

J'ai essayé de me confronter à la vérité, de la tirer de force de la personne d'en face. Le résultat n'était pas satisfaisant, et il ne me restait plus aucune force pour la chercher ailleurs.
Alors j'ai rassemblé ce qu'il restait et je suis partie loin, comme à chaque fois que je me sens prise au piège.
Comme à chaque fois qu'on essaye de me faire aller de l'avant un peu trop vite.

Je suis allée au pays où on accepte que je sois très lente, et très blessée, et pas très souriante, et parfois très endormie.
J'avais pas envie d'en revenir, mais j'avais pas le choix non plus. 
Lors d'une des plus grandes crises de ma vie, quand je fuyais My Sorry Ever After, je suis partie encore plus loin, après. 
Mais là je suis revenue bien tranquillement à Paris. Complètement accablée par le retour vers la geôle après la pause radieuse. Le tarot a dit que c'était mon cloître et qu'il fallait que je traverse le procès pour trouver la paix. 
Oui, le procès. Celui que je me fais à moi-même, très certainement. Et jusqu'à ce soir, je n'avais pas bien compris pourquoi.

Pour m'être laissée sauter dessus par un type que j'avais fermement décidé de garder comme ami ? 
Pour ne pas avoir coupé court alors que je savais qu'on se dirigeait à une vitesse folle vers un mur en béton armé ? 
Pour avoir manqué d'affirmation et de volonté, devant les belles paroles de gens bienveillants qui ne voulaient que mon bonheur mais avaient le malheur d'avoir tort, malgré tout ?

Non. J'ai eu beau tout retourner dans ma tête, je peux concevoir ça, et le digérer. Lentement. Mais je peux. J'ai surmonté My Sorry Ever After, puis le Tinman, et avant cela j'avais même affronté la mort et la maladie. Je ne suis pas en sucre. 

Ce que j'ai compris ce soir, et ce dont je parviens à peine à discerner les contours tellement je le prends dans la face sur le tard, c'est que j'ai laissé quelqu'un se servir de moi.

Et ça n'était jamais arrivé.
Malgré tout. Tout ce que j'ai traversé, j'ai toujours été une et indivisible. On a tenté de me soumettre, plus d'une fois, et j'ai préféré perdre des milliers de plumes plutôt que d'y être contrainte.

Il est le premier à n'avoir eu rien à foutre des barrières et des avertissements, à se servir comme dans un buffet à volonté sous prétexte que ça avait l'air gratuit. Et à y revenir, même après avoir été poliment informé de la méprise.

On s'est servi de moi, et je me suis laissée faire. 
On s'est servi de moi en dissimulant ça comme un vase cassé sous un tapis. 

Se servir de quelqu'un, je l'ai fait, oui. En annonçant la couleur, en vérifiant que l'autre était sur la même longueur d'onde. Plus que ok : sur un pied d'égalité. Aussi stable que moi par rapport à la situation, qui n'attendait rien de plus, rien de moins. 
Certains ont menti. Ont dit qu'ils étaient ok quand ils ne l'étaient pas. Je n'ai jamais pu totalement les plaindre, ils étaient prévenus, vaccinés. Mais depuis, j'ai retenu la leçon, et je ne fais ça qu'avec des inconnus qui cherchent la même chose que moi, clairement. 

J'avais une graine d'amitié entre les mains (du moins, je le croyais), et j'avais terriblement envie de la voir grandir. 
J'avais beaucoup de curiosité, et je riais énormément, et je revivais, un peu. 

A la place, j'ai récolté un cratère au milieu duquel se sont perdus les trois derniers mois, maussades, terribles. Seule, à digérer quelque chose dont je n'ai jamais voulu. Seule, quand j'avais voulu l'être moins, et m'assurer quelqu'un de plus de solide, de bien, dans mon existence en reconstruction. 

Ce soir la désillusion est grande, et si je ne me déteste pas tout à fait, je me dis que je ne serai jamais plus entière pour autant.


The summer is here at last
The sky is overcast
And no one brings a rose for Emily

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