mardi 27 octobre 2009

Here it is

Ici, c’est un microcosme multiethnique. On peut traverser toute la galerie Richelieu sans entendre un seul mot de français mais du mandarin, de l’arabe, du portugais et de l’allemand.
Par provocation ou par logique universitaire, les cours d’arabe sont dispensés juste à côté des cours d’hébreu, et les poubelles se trouvent recouvertes de stickers à la gloire de la Palestine.
D’un côté du mur, des jeunes filles voilées, des jeunes gens barbus, de l’autre, des garçons à kippa, des garçons à bouclettes. Et moi, qui passe au milieu comme dans un champ de mine.
Les gardes sont très pointilleux et ne laissent entrer que les étudiants encartés, enlettrés, avec des feuilles toutes pleines de tampons officiels.
Le cadran solaire est doré à la feuille d’or, on refait la façade multicentenaire de la chapelle, et les toilettes sont les plus crades de tout Paris.
Le sol est en marbre, les murs couverts de toiles majestueuses, les amphis en bois, les bibliothèques pleines de passages secrets et d’ouvrages rares, les cafés sont à 60 cents dont 10 euros de consigne sur le gobelet plastique.
Le crous est complètement bien caché. Et personne ne se mélange. 7000 étudiants, il paraît.
Dans la cour centrale, j’observe, les petits groupes, fumer, mais très peu rire.
S’esquinter les chevilles sur les pavés, marcher les mains dans les poches, le regard fuyant.

Tous sont très classables. Cela va du baba cool héritier de la culture hippie qui colle des stickers réclamant l’installation de panneaux solaires ou d’éoliennes aux costumes cravates accrochant des tracts proclamant La Sorbonne aux français, et puis les étudiants de gauche qui profitent des heures tardives, des couloirs déserts, pour recouvrir les murs de convocations à des assemblées générales. Mais qui les écoute encore ?
Ici on se voile la face au propre comme au figuré, lorsque les graffitis illustrent les salles de classe on les recouvre de papier kraft, on ne les efface pas.

Ici les vieux côtoient les jeunes de 16 à 77 ans, et ce que je dis est fondé.
Cela pourrait être explosif mais tout le monde s’en fout.
Le diable ici, c’est l’administration, et tout le monde s’accorde à le dire.
Les professeurs sont des ombres fuyantes sachant très bien se cacher dans leurs espaces réservés, s’enfermer à l’aide de leurs trousseaux d’innombrables clefs.
Ma petite voix essaye de se faire sa place, même si elle est un peu cassée.
Ma classe est un noyau, une sorte d’élite sans grosse tête, anonyme.
L’observation est ma base de l’édition.
Notre projet littéraire sera un amalgame de cela… mettre tous ces ingrédients disparates dans le même bouillon et en tirer un breuvage pas trop dégueulasse. Assez cohérent.

En marge.

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