dimanche 15 août 2010

Fallen

Une falaise comme il n'en existait plus. Une falaise d'où on pouvait pousser un amant qui en savait trop. Une falaise où l'on pouvait sauver un suicidaire. Une falaise où l'on pouvait aussi demander en mariage son alter ego.

Un endroit neutre mais une source d'inspiration quand même.

Je n'avais jamais vu Sin en robe mais, les jambes dans le vide, de dos, je devinais.

Je réalisais que, plus qu'un autre, j'étais passé à côté d'elle.


J'avais le choix : en profiter pour la pousser et débarrasser la Terre du plus grand supervilain de tous les temps, m'asseoir à côté d'elle et essayer de négocier ou succomber à la terrible et inexplicable envie de la prendre dans mes bras.

La tête en fusion, je décidais d'opérer un mix des trois. M'asseyant avant toute chose.

La mer se débattait contre les pierres et roulait tant bien que mal sur elle-même pour réunir ses forces. Tout rugissait. Lorsqu'elle ouvrit la bouche, pourtant, tous les sons se mirent en sourdine.

"Tu m'as manqué."

Elle glissa sa main dans la mienne et sa nuque contre mon épaule. Je me figeai.

"Tu as froid ? Venir ici à cette époque, c'était stupide... Quand te lasseras-tu de mes idées folles ?"

Elle me dévisagea, ses yeux raccords avec le ciel, les flots, et même ma chemise. Elle s'attendait à un "jamais", je le sentais. Comme si j'avais ce texte à réciter, mon inconscient m'ordonnait de le faire.

"Je suis désolée, Killian. La prochaine fois on ira où tu veux."

Le contact d'un de ses doigts, particulièrement, était froid. Dur. J'ai du vérifier par trois fois pour y croire : son annulaire était cerclé d'un anneau d'argent.

"...avec qui tu es... quand..."

Il y avait trop d'interrogation dans son regard pour douter de sa sincérité, indice supplémentaire, mon propre annulaire portait le même bijou.

"Je t'ai déçue, c'est ça ?"

"Non. Je suis... surpris."

"Je me réveille chaque matins un peu plus surprise que la veille de te voir toujours là. Et je meurs d'envie de me pincer, pour voir si tout cela est vrai, mais j'ai peur, comme si cela pouvait vraiment tout faire disparaître."

"Ne te pince pas. Je suis là."

Il fallait entretenir le rêve le temps de savoir où j'étais réellement.

"Et ce comics que tu viens de finir, tu me le conseilles ? Celui avec cette fille avec des flammes jaillissant de ses mains sur la couv' ?"

"C'était... de mauvais goût. Et ça pourrait te donner de mauvaises idées."

"Je ne ferai pas de mal à une mouche, tu le sais. Pas tant que tu seras là, en tout cas."

Tous les sons revinrent à leur volume maximum.

"Oh merde. Je l'ai encore fait."
"Quoi ?"
"Le coup du chantage affectif. Je le fais malgré moi. Je suis désolée. C'est comme ça que j'ai perdu tout le monde. Tu sais que tu peux partir. Tu peux partir quand tu veux."

Mon subconscient artificiel me hurlait de lui répondre que je ne partirai pas, qu'elle ne serait plus jamais seule, qu'elle ne me faisait pas peur. Ma conscience, elle, s'efforçait de déchirer cette toile sirupeuse pour y voir plus clair.

"Je t'ai fait peur à toi aussi, hein ?"
"Je suis juste un peu perdu."
"Je t'ai coincé ici. Dans cette relation. Sur cette falaise. C'est mon grand talent : manipuler les gens pour qu'ils croient qu'ils m'aiment."
"Sin..."
"C'est le cas n'est-ce pas ? Toi non plus."

Elle avala sa respiration suivante comme une lame. Sa main glissa jusqu'au sol où elle sembla se solidifier. Par réflexe, comme avant, je me protégeais le visage. Une bourrasque se leva.

Quand j'osais regarder de nouveau à côté de moi, elle avait disparu. Un nouveau bruit remplit alors l'atmosphère : celle d'une masse et d'une chute sourde.

Je me penchais un peu plus au bord du précipice pour y découvrir Sin, comme un pantin, affalée sur une aiguille, qui l'avait transpercée de part en part.

Mes poumons brûlaient et se rappelaient à mon bon souvenir : j'avais tout simplement arrêté de respirer.

Une autre sensation dans le genre attira mon attention sur ma main gauche.

La bague. Je la retirais rapidement avant que ma peau ne fonde ou un truc du genre. C'est là que je remarquais l'inscription gravée :

"Some rise by Sin..."

...and some by virtue fall continuai-je, seul.

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