vendredi 1 avril 2016

She said I'd been romanticizing heroin



Un été, il y a presque 3 ans, j'ai entendu la voix désabusée, rocailleuse et acoustique d'un garçon maltraitant ses cheveux. Un garçon au physique un peu ingrat. Aux oreilles de simplet. Aux vêtements noirs gris délavés et à la tronche sans cesse en biais. Emo jusqu'au bout des ongles. Désabusé et désabusant, mais follement doué.

Ce soir, j'ai été électrisée et revivifiée par un garçon qui se tord comme une liane, dont l'élasticité peine à remplir un pantalon en cuir pourtant fort appréciable. Le cheveu soyeux, bouclé et souple, dans lequel il passe une main nonchalante mais calculée. Chaque geste est millimétré et il sait quand faire décoller son public. Ce garçon envoie de l'amour, des brouettes d'amour. Il est sexy sage. Sexy family friendly. C'est coquin reposant et pas sale. L'Olympia est rempli d'oestrogènes et, pour une fois, ça n'est pas pour me déplaire. C'est libérateur. Il y a une communion. C'est visuellement parfait.

Derrière le micro, entre ses poses assurément répétées, je discerne le sourire triomphant de celui qui a décroché tout ce qu'il espérait.

Ce garçon, dans les deux cas, c'est Matthew "Matty" Healy.


Cet été là, il y a trois ans, c'est son Sex qui m'a mise K.O :

 

J'ai poussé mes premiers "Ooooh Matty..."
J'ai tout de suite fondu pour son style émo ouin-ouin qui me correspond tellement.

Ses paroles sont simples, honnêtes, un peu racoleuses "hanlala elle veut faire que du sexe avec moi alors que moi je l'aime bien +++ #sadpuppy".

J'ai suivi Matty de loin en loin, avec un regard bienveillant qui n'en a plus fini de s'écarquiller quand j'ai assisté à sa métamorphose.


Le petit canard boiteux (qui n'était pas si vilain) est devenu un sex symbol tout en acceptation de sa féminité.


A coup de mini-scandales, de provocations gentillettes et de frotti-frotta avec de la popstar globale, il a déboîté les frontières pour débarquer un peu partout dans le monde, dans les oreilles de jeunes filles qui ne demandaient que ça.

Je suis fidèle. Très (trop) fidèle. Et même si Matty est un sacré boulet pour ma streetcred, j'aurai toujours un soft spot pour lui.
Les gens se rengorgent quand je balance son nom ou que j'ai des billets pour The 1975 (qui n'est un groupe qu'en apparence, les autres membres n'existent tellement pas que Matty ne prend pas la peine de les présenter sur scène).

Car Matty et sa tête à claque sont les nouveaux chouchous du NME et les anciens, qui sont mes chouchous à moi, ne peuvent pas voir The 1975 en peinture.

Matty a percé en même temps que les Palma Violets et a dit beaucoup de bien d'eux à leurs débuts, ascenseur qui n'a - bien sûr - jamais été renvoyé. Ce qui a donné un fameux épisode qui m'a fait rire aux éclats mais rire jaune beaucoup d'amies à moi.

Plus violents (toujours plus violents) mes Fat White Family, chient un peu sur la tronche de Matty dès qu'ils en ont l'occasion.


Ici en faisant référence au titre à rallonge du second album : I like it when you sleep for you are so beautiful yet so unaware of it. (Ok, y a de quoi, et les Fat White sont géniaux, surtout quand ils font du mauvais esprit)

Oui l'enfant spirituel de simplet et grognon s'est transformé en progéniture géniale de Lana Del Rey et Michael Hutchence (INXS)



Il est devenu l'insupportable Matty, à qui on pardonne tout, qui s'en sort avec les louanges de la critique et du public, qui valide même ses choix de tatouage torsaux un peu discutables.


Haters gonna hate. Forcément. Indubitablement. 
Moi j'ai jubilé. La réussite trajectoire en flèche de celui qui joue au petit morveux en se laissant griser par son personnage. Qui en tire des chansons émo ouin-ouin mais dansantes, et sculpturales, cette fois. Et rebelote. 
Il n'a pas que le talent, et le look, et l'attitude, il a tout compris à cette industrie.
Et moi je ne comprends rien à ces brassées de purin qu'on lui envoie à la figure car, pourquoi mes chouchous du rock, vous comparez-vous à celui qui n'a jamais prétendu à rien d'autre que de la pop ? 

Je comprends que ça soit agaçant : le mec a réussi en grand ce que vous faites en tout petit, péniblement, avec les moyens du bord et pas beaucoup d'aide extérieure. Avec Matty tout a l'air facile, et c'est énervant. Comme si lui et ses trois potes d'enfance avaient vu de la lumière et étaient entrés... Sauf qu'ils bossent depuis 2002. Que le mec a eu une vision, certes individualiste et vouée à établir un culte de sa personne à peine dissimulé, mais il est allé jusqu'au bout du truc. Avec le succès que vous connaissez maintenant.


Alors oui, ce soir, j'ai eu l'impression que Matty faisait partie de la famille quand je l'ai vu jouer au bonhomme en flottant dans ses fringues trop grandes qu'on aurait dit sorties de ma garde robe. J'ai aussi eu l'impression que je faisais partie de sa famille. Il couvait du regard ses ouailles, avait un petit signe pour chacune. Le mec se fout pas de la gueule de son public avec son show. Visuellement, musicalement, tout est au cordeau. Le son est impeccable et sa voix aussi. Il a même bossé ses "r" français, tu vois le jusque-boutisme du type... 

Je suis sortie de cette communion bienveillante avec l'impression d'avoir assisté à la remise de diplôme du petit dernier. Les oreilles sourdes des cris stridents de gamines à qui il a fait découvrir tout un univers des possibles masculin, j'en suis sûre. Prête à défendre bec et ongle ce petit bougre à qui osera tirer sur celui qui n'attend que ça. 

"We've just come to represent 
A decline in the standards of what we accept!"
Yeah... 
Yeah... 
Yeah?! 
No!

1 commentaire:

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