samedi 25 février 2017

[Franxit - Part I] Much ado


[I had rather hear my dog bark at a crow, than a man swear he loves me.]

Je ne sais pas comment des enfant aussi dissipés peuvent donner des adultes aussi bien élevés. 
Toujours est-il que j'ai été entourée de petits brittons pendant mon séjour et que j'en aurais bien zigouillé 2 ou 3. Mais que dès qu'il s'agissait pour moi de retrouver mon chemin, je devais sortir mon plan très rapidement car si je semblais perdue plus de 30 secondes, un anglais s'arrêtait pour me venir en aide à coup de "Need some help, darling?" "Can I help you, love?"


Je suis une introvertie en vacances, je ne veux pas parler à des gens, surtout pas dans la rue, et surtout pas s'ils m'ôtent toute la self-esteem que j'ai à retrouver mon chemin toute seule. Je vous rassure, je les remercie poliment et je continue mon chemin d'un pas déterminé, écouteurs dans les oreilles et cheveux en rideau. 

A priori, ça fait de moi une mild-bitch. C'est pourquoi j'ai été des plus surprises quand, en entrant dans mon resto préféré là-bas, j'ai demandé s'il était possible d'avoir une table et les deux licornes serveuses (aux cheveux de toutes les couleurs et aux big smiles qui semblaient sincère) se sont battues pour me placer. Je les ai entendu murmurer pas très discrètement à quel point j'étais mignonne et choupinette et coy (oui, comme la carpe). Je me suis assise avec un big smile en retour, parce que c'est ce que la société attend de moi, que je suis dans mon resto préféré, en FUCKING VACANCES et qu'on a été sympa avec moi. 
Autant j'ai un langage des plus débridé quand il s'agit de parler à de la rockstar avec 2 pintes dans le nez, autant quand je dois demander quelque chose à quelqu'un, je me transforme en Little exchange student Johnson. Apparemment, j'utilise abondamment les tournures de phrase surannées qu'on nous inculque à l'école, ce qui me rend Oh so chou mais aussi Oh so pas comprise par tous les expats qui forment 80% du secteur tertiaire à Londres.

Parce que oui, quand je suis arrivée dans mon tout petit hôtel qui ne paye pas de mine, je suis tombée sur une réceptionniste Russe. C'est ma malédiction personnelle. Où que j'aille, quoi que je fasse. 
Mais encore une fois, ça s'est super bien passé. J'ai porté ma valise légère jusque mon étage, et j'ai commencé à couiner de satisfaction en voyant le décor Oh so british (la porcelaine sur les murs, les estampes, la moquette, les portes en bois de traviole). J'ai glissé ma clef dans MA serrure vers MA chambre (toujours ce sentiment d'omnipotence d'avoir une chambre à moi toute seule quand j'ai passé ma jeunesse à PARTAGER dans des hostel et à ruiner mon cycle de sommeil).



Ma chambre est d'une mignonneté rare. Rose et blanche, avec de grands rideaux voluptueux et une hauteur sous plafond qui ferait rougir tout le parc locatif Budapestois. Le lit est haut comme chez ma grand-mère, et j'ai un lavabo, et une bouilloire et c'est en buvant un thé que je découvre que ma fenêtre donne sur un cour de tennis. A 5 minutes de Saint Pancras. Un puits de verdure et de gens sains en arc de cercle, un gros bout de ciel et des arbres majestueux. 
Je souris à mon reflet dans le miroir (de droite)(parce que j'en ai DEUX) et je prends un malin plaisir à défaire mes affaires, rangeant tout très bien parce que pour une fois j'ai plus de rangements que de choses à y entreposer.


Je suis une introvertie en vacances, il est 16h30, et je décide donc d'aller dîner tant que personne d'autre n'y est. Je m'en vais de mon pas de charge manger la ville et la traverser en presque-courant avant de la savourer, les jours d'après. Hop Bloomsbury, hop Soho, hop le West end et hop mon resto préféré.


En mangeant, je lis King Kong Theory qui m'a été recommandé je-ne-sais-combien-de-fois par des gens biens. Despentes, avec ses mots, libère deux trois zones grises de mon esprit, concernant mes relations avec les hommes, ce que j'ai le droit de faire en tant que femme, et le fait qu'on me regarde de travers depuis que je dis exactement tout ce que je pense. Du coup je prends un dessert, parce que ma pièce de théâtre ne commence pas avant un moment, et que les pages tournent. 

Je parle sur whatsapp avec Meor qui est partie avec dévouement me chopper Justin Trudeau pour qu'enfin je puisse avoir un homme de compagnie à ma hauteur - si ça, c'est pas de l'amitié ! Bref, on est encore plus (ou encore moins ?) en décalage horaire et bizarrement, la communication n'en est que plus récurrente. 

Je ne me sens pas seule. Je me sens forte. Parce que j'ai eu envie d'aller à Londres. J'ai eu envie d'aller voir des shows. J'ai eu envie de partir. J'ai eu envie de tout ça et personne n'était dispo ou compatible ou je ne sais quoi, et j'ai dit "fuck it".
J'y vais quand même. Et je vais kiffer. Et il va rien m'arriver. Et tout va bien se passer. Et de toute façon, qui s'en inquiéterait ? 
J'ai repoussé loin loin toutes les fausses excuses qui s'abattaient sur moi et, un soir de burn-out parisien, j'ai pris mes billets, bien tout calé et maintenant, je profite.


C'est mon premier soir à Londres, la Royal Shakespeare company va shakespearer et pendant ce temps, le monde me foutra enfin la paix. 

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