mardi 28 juin 2011

I don't mind if I lose 'cause if I win I'll be so confused

Toilettes des solidays. J'entr'aperçois une tâche mi-verte mi-jaune en haut à gauche de mon front.
Parce que pour une fois j'ai les cheveux attachés.
Sinon on voit jamais mon front.
Réflexe. Je frotte.
Bizarre. Ca part pas.
C'est quoi ? Du feutre ?
Non.
Un bleu.
Un bleu mi-jaune mi-vert, mais un bleu quand même.

Je me suis fait ça quand ? Ah oui, c'est vrai que je m'en souviens pas.
On est vendredi soir et je me souviens toujours pas de mon mardi soir.
Enfin de la partie de mon mardi soir qui fait que j'ai dû porter des manches longues et un pantalon mercredi et jeudi.
De cette partie de mon mardi soir qui fait que je fais mes shampoings tout doucement depuis, parce que mon crâne est plus bosselé qu'une descente olympique.

Mais je suis aux Solidays, tout va bien. C'est mon pélerinnage festivalier annuel. Je suis dans ma caverne intérieure. Il y a des gens heureux partout autour. De la musique. Des odeurs de bouffe de tous les pays. Des torses nus. J'ai un cahier dans mon sac, et j'écris. Un truc qui commence par "Je me souviens très fort de l'indépendance ressentie à mon premier festival..." et qui parle de trucs.
Du genre "avant j'étais un groupe", "Carl" et du fait que "Je ne suis pas la fille du port. Parce que je ne les attends pas.".

Un festival ça te fait tout revoir à la baisse. C'est un mini Koh-Lantah. Après t'es heureux d'avoir une douche, un lit, un sol.

Un festival c'est danser pieds nus dans l'herbe avec 75 000 personnes et faire semblant de pas être à 10km de Paris. Un endroit où les gens se balancent littéralement dans le vide. Avec des élastiques, ou dans une fosse.

C'est s'apercevoir que les gens autour sont pas mal. Pas dans le genre "ouh je le ferai bien entrer dans mon monde" mais plus "l'être humain est pas si affreux". C'est aussi réaliser que si j'avais à choisir entre moi et quelqu'un d'autre, avec tout le choix qu'il y avait, je prendrai sûrement quelqu'un d'autre.
Je ne suis pas triste, pas blasée. Je suis dans mon nirvana. Je ne veux plus rien si ce n'est boire, manger, respirer, et des boules quies, éventuellement.

Même comblée comme j'ai pu l'être, mon sourire a eu énormément de mal à s'accrocher. J'ai senti l'effort sur mon visage. Comme si je devais accoucher de ce putain de truc qui est pourtant un pass universel. Mais à l'intérieur, ça va. A ce moment là, un seul truc m'obséde : qu'est-ce que j'ai bien pu faire mardi soir ?

A part embrasser un inconnu. A part danser sur un bar. A part avoir l'envie de me percer l'oreille droite et d'y laisser pendre une plume bordeau.

J'essaye de repousser le fait que j'ai du mal à gérer ma maladie, son accélération vive et soudaine. De ne pas réfléchir au fait que depuis que j'en ai fait l'annonce à mes plus proches (comme il est conseillé de faire, pour éviter la "kikoo méga-surprise les gars je fais une crise et maintenant : improvisez") on m'invite moins.

Je pense à l'instant présent. Au fait que je ne vis plus pour les autres mais pour moi, et que c'est damn more complicated.

Je limite mes bières de festival (pourtant vitales) à une par jour, parce qu'on sait jamais. Et je suis préoccupée. Malgré tous les divertissements du monde. J'ai mes sourcils froncés. Ceux que j'ai eu de 9 à 17 ans sans discontinuer. Parce que je suis aux Solidays. Que je suis malade. Et même si j'ai pas le sida, je m'imagine à quel point ça doit être amplifié, pour eux, cette sensation d'isolement. 

Je ne pense pas aux "assumes que tu bois au lieu de mettre tout sur le dos d'une pseudo maladie", alors que ce n'est pas ça, pas que ça. Parce que pour que les gens comprennent vraiment ils faudraient qu'ils vivent ce que je vis, et que je ne le souhaite évidemment à personne.

De navettes en noctiliens je rencontre toutes sortes d'autres gens, des gays, des bourrés, des vieux qui puent, tous ostracisés à tort ou à raison. Je me demande "et si je fais une crise dans le noctilien, ils bougeront plus que lundi soir ?"

Lundi soir. Lundi soir. Lundi soir. Ta gueule Ta gueule Ta gueule. Comme un refrain.
Fermer les yeux secouer la tête.
Ouvrir les yeux parce que dès que je les ferme...

Je me demande "et si je fais une crise dans le noctilien, je me réveillerais où ? Je me souviendrais de quoi ?"

Ma vie est devenue pleine de surprises.

Peut-être que mes amis vont à nouveau tenir sur les doigts d'une main, bientôt, mais alors, je me souviendrai plus facilement d'eux, où que je me réveille.

Je suis aux Solidays, j'aide un peu les gens malades. Eux vont mourir, à court ou long terme. Moi pas de ça. Sauf si ça me pousse à. Fermer les yeux secouer la tête. Ouvrir les yeux parce que...

Boom into my head,
Boom into my body dead
What da hell am I doing on my ass?
Coma coma hey, come mi friend as dead as mey

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