lundi 15 novembre 2010

Fall in Live #11 : Je veux pas y aller (mais j'y suis allée quand même), Louis Ronan-Choisy au Zébre de Belleville

Pour une fois commençons le live report en vrai live et sans léger différé, ce soir je dois voir un concert de l'ami Louis (Ronan-Choisy), et je n'ai pas envie d'y aller. Comme si j'avais rdv chez le dentiste et ce n'est PAS une coïncidence si je dois sortir métro Couronnes. Bon.

Actualisation #1 : Hélo vient de me menacer physiquement à savoir que si je viens pas elle me botte le cul pour me tirer de mon lit. Avant de me dire "si t'es déçue on mangera indien" ce qui aurait pu marcher si je n'avais pas mangé indien ce midi. Avec des masseuses. Mais passons.

Actualisation #2 : L'amie Klervi me dit d'y aller dans la discrétion et la dignité, deux mots qui me sont peu voire pas familiers. On n'est pas dans la merde.

Actualisation #3 : En plus c'est pas comme si il avait choisi (ahah) un quartier où je ne vais JAMAIS, par CHOIX. Alors qu'il est à 2,5km de mon domicile. No way boy.

Actualisation #4 : Il est 18h54, je pars dans moins d'une heure (si je pars !)(suspens)(action)(trépidance) et D'apparence en apparence et spécialement Romy me donne toujours autant d'allumer une cigarette alors que je ne l'ai jamais fait de ma vie. Preuve s'il en est que je ne dois pas y aller.

Actualisation #5 : Vous penserez à moi pendant Mon Bel assassin ? Ah bah non. Vous pouvez pas.

Actualisation #6 : L'opinion publique se prononce majoritairement pour le port de postiche + nez et barbe factice. Je le note.
Actualisation #7 : Je viens donc de tester le maquillage Orange Mécanique, et bien, sachez que messire Alex est donc un lucky fellow, car cela ne va pas à tout le monde. Non non non.

Actualisation #8 : Et s'il m'arrivait un malencontreux accident on the way ? ça compterait pas. Du coup.

Actualisation #9 : Je ne peux décemment pas y aller : il y a Mark Zuckerberg en T-shirt et en live stream. Voilavoila.

Actualisation #10 : Si j'y vais, c'est seulement pour revenir et dire "en fait c'était vachement bien, j'ai même eu les larmes aux yeux", sinon on dira que j'y suis pas allée, alright ?

Actualisation #11 : Je suis partie.


Oui. Bien sûr que j'y suis allée. Preuve :

J'y suis allée parce que j'avais déjà acheté ma place, et si j'avais déjà acheté ma place, c'est parce que comme par miracle, Louis jouait le seul soir de la quinzaine où notre programme Fall in Live était vide. Le destin, toussa.

Nan déconnez pas. Vous allez voir, ça fiche les jetons.

Comme vous avez pu le lire, je traînais sérieusement les pieds, je redoutais plus que tout ce concert parmi tous les autres. Et j'ai fait ce que j'ai pu, en chemin, pour nous mettre en retard (j'ai même failli enfoncer la porte d'une église catholique), pour nous perdre voire pour nous petit-suicider avant d'arriver sur place. Déjà, en partant de chez moi, j'avais littéralement acte manqué en oubliant mon billet.

Avec tout ce traînage j'ai tout de même réussi à arriver devant la salle pile pour croiser Louis. Voila. C'est tout moi. Je croise les gens. Toujours. Même quand je veux pas. Même quand ils veulent pas.

Alors qu'est-ce que je fais ? Je vais quand même pas l'arrêter lui dire "Hey, tu me remets ? Echarpe rouge ? Non je l'ai pas mise ce soir parce que je voulais pas que tu me remettes et je doive encore une fois ressasser notre historique conversationnel chaotique. Oh, et tu as la bise de Klervi. Comment ça "laissez moi tranquille mademoiselle" ?" donc j'ai marché encore pendant 10 mètres, une Hélo aux trousses qui m'a rattrapé par l'arrière de ma veste militaire rouge et m'a littéralement trainée jusque devant la salle, mais comme je suis une mule, j'ai dit "noooo waaait" et j'ai dégainé mon appareil photo pour prendre la série de photos des affiches dégoulinantes dont vous avez un aperçu ci-dessus, sous les yeux de l'intéressé, bien sûr.

C'est le moment où il faut que je vous explique deux trois détails, c'est le moment chiant de cette note pour les garçons et croustillant pour les filles. C'est le moment "Heights revival anno 2004".

En 2004 j'étais une fille paumée, déjà insomniaque, et qui aimait le rock français. J'avais entre 15 et 16 ans (certains dirons 15 ans et demi, mais on est pas sérieux quand on a 15 ans et demi...) et la seule chose qui me sortait de ma torpeur provinciale et normande était l'accession familiale aux chaînes du satellite. Une nuit, je suis tombée sur le clip de Leylie Brown, premier single du premier album D'Apparence en apparence. Je me souviens du grand moment de What the fuck que j'ai traversé. Je n'avais rien bu, rien pris de toxique et pourtant, j'étais bouchée bée devant ce clip, à moitié amusée à moitié moqueuse à moitié charmeuse. J'ai vite remisé dans un coin de mon cerveau ce moment précis de cette nuit là... avant qu'il ne soit déterré par Mouloud Achour. A l'époque où il ne s'appelait que Mouloud et qu'il officiait sur MTV France. Chaque jour il invitait un artiste à venir jouer en live et ce soir là ce fut lui. Lui. Louis. Enfin, vous suivez. Je ne sais plus ce qu'il a joué, peut-être La Rose, mais je n'ai eu de cesse que de chasser son album chez tous les disquaires de Rouen.

La première écoute, elle aussi, je m'en souviens très bien. Parce que c'était de nuit. Que j'étais sensée dormir, alors j'ai mis le disque au minimum pour ne pas me faire chopper par mes parents en pleine violation de mes droits d'ado. Ca a été une sorte de coup de foudre émotionnel, poétique et nocturne. Dès lors, je me repassais le cd inlassablement pour m'endormir et je rêvais des trottoirs parisiens sous la pluie, me forgeant nuit après nuit une image plus affinée de ma capitale rêvée. C'est à travers les mots de Louis que j'ai imaginé un Paris nocturne qui m'était inconnu. Car les provinciaux restent peu de ce côté du périph' après 17h. Alors oui, le voir à Paris, dans le Paris que je connais et que je maîtrise depuis 3 ans, c'était perturbant.

L'autre partie de ma réticence provient du fait qu'être une fan de la première heure, à l'âge où on a plus l'âge d'être fan et où la première heure est morte et enterrée dans la mémoire collective, c'est juste être à côté de tout. Dans le no man's land du public, et il le dira juste avant Le Baiser je crois "Ah mais personne la connait en fait.". Je ne lève pas mon petit index, je ferme ma gueule, mais oui, moi je la connais.

Fan de la première heure, ça voulait quand même dire que je bombardais de mail son adresse pro pour l'engueuler/encourager lorsque le deuxième album n'allait pas assez vite, ça voulait aussi dire que j'ai du monter le premier site de fan (ne cherchez pas, il est enfoui dans les limbes internétiques, et c'est mieux pour tout le monde) et que j'ai un peu menacé tout mon iut pour qu'ils se déplacent à son showcase au Havre, quelques temps après la sortie de La Nuit m'attend, le fameux deuxième album. Je vous passe les détails sanglants de cette rencontre/confrontation avec la réalité du showcase du Havre.

C'est en réfléchissant à tout ça et en martelant mon portable de textos aux gens jaloux que je sois à l'un de ses seuls concerts de l'année et pas eux, que je le vois à nouveau se diriger droit vers moi pour mettre en place une caméra sur un jukebox (ne cherchez pas, et essayez de suivre). Je fais toujours dans la dignité, le panache et la discrétion et je ne dis rien, je bouge pas, je me rends invisible comme un caméléon zébré dans cette salle où tout est à rayure. Il finit par rejoindre les coulisses - pas pour longtemps, et je textote avec d'autant plus d'acharnement.

Puis vient l'heure du concert, où j'ai juste envie de me planquer derrière Hélo, parce que la troisième partie de ma boule au ventre va connaître son heure de vérité : la peuuur de la déceeeeption.

Oui, parce qu'après le deuxième album, le Havre, toussa, il y a eu le troisième album, qui m'a énormément déçue. Dans le genre "ôte toi de ma vue, renégat, tu n'es plus digne de ma discothèque". Ouais, je suis assez entière en général. En gros, deux ans de passage à vide où je renie tout. Et puis. Et puis, le jour où, dans les bandes-annonces d'Agora j'ai reconnu sa voix, sa voix avant ses yeux, avant ses yeux et son visage. C'est toujours sa voix que je reconnais en premier (parce qu'on a le chic pour se retrouver toujours au même endroit au même moment comme vous avez pu le remarquer). Bande-annonce du Refuge, le film de François Ozon (sûrement mon réalisateur français préféré) sorti il y a quasiment un an. Je m'aperçois qu'en plus de jouer il a composé la B.O, et tout cela me tiraille de curiosité. Son passage au Grand Journal finira par me convaincre de laisser une chance au Louis acteur ce qui me poussera à redonner, plus récemment, une chance au Louis musicien, à travers la fameuse B.O et Rivière de plumes, dernier disque en date.

Début du concert. Je suis agréablement surprise par le choix de débuter le set par Des Flocons dans l'eau et Gaspard David Friedrich, sûrement mes deux chansons favorites du dernier album. Après, ça se gâte, puisqu'il embraye sur des chansons avec lesquelles je n'adhère que très peu, le côté Delerm étant à mon goût trop prononcé et les paroles trop faibles. Puis, quelques chansons du premier et deuxième album, je suis ravie, mais je traverse un grand moment de solitude, la plupart des gens autour de moi ne connaissant apparemment que la période post-Refuge.

Puis, vient ce que je pensais qu'il avait arrêté en même temps que la drogue : la reprise de Music de Madonna en piano/voix. Alors oui, ça fait partie des grands classiques de ses concerts (même si j'aurais préféré sa version de Toxic de Britney Spears) mais ça surprend toujours. Cependant, je remarque pour la première fois à quel point je préfère lorsqu'il chante en anglais, et toute la dimension que sa voix prend dans cette langue.

Parce que si tout le monde autour de moi s'accorde sur le fait qu'il y a quelque chose de diablement fascinant chez Louis, je pense que s'il sortait un album anglophone, c'est le monde tout court qui serait conquis.

Arrive la poignée de chansons qui bougent, dont le classique (si si j'insiste) La Nuit m'attend qui me parle toujours autant (la nuit, Paris, remember). Je dois signaler que ses musiciens et surtout son guitariste électrique, sont assez démentiels et étaient parfaits de bout en bout. Les choeurs au masculin, je préfère d'ailleurs légèrement à ceux féminins un peu agaçants sur certaines chansons en studio.

Et puis les rappels. Beaucoup de rappels. A ce moment là je me balance d'un pied sur l'autre, n'étant pas sûre de si j'ai aimé, adoré, haï, juste un peu détesté. Je ne sais pas, je suis perdue. Je suis à moitié la Heights Johnson de 2004, à moitié celle de 2008 et presque complétement celle de 2010, du coup ma bagarre intérieure fait rage mais est finalement vaincue par la chanson que j'attendais plus que toute autre : Mon Bel assassin. A ne pas écouter avec un rasoir à portée de main, mais à écouter absolument.

Mains dans mon manteau, nez dans mon écharpe, je valdingue sur les trottoirs humides de Belleville. Paris m'attend, la nuit aussi. Hélo m'accompagne jusqu'au métro. Dernière blague avant la fin, je fais semblant de me retourner et je lui lance :

"C'est bon, t'as vérifié, il me suit pas ?"

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