C'est un peu la bousculade dans ma vie. Même si je gère assez bien sortir tous les soirs et que je pourrais le faire pour les siècles des siècles, j'ai quand même reposé mes yeux la nuque calée sur un fauteuil en faux cuir puant du conservatoire square Rapp.
Avec Hélo, on a dit beaucoup de merde sous l'œil réprobateur de vieilles habitant sûrement le quartier, histoire de se venger de la conversation subie lors de notre dernier concert de musique classique.
Ma connaissance des sonates violon/piano se limite à Sonata for Violin and Piano in A Major de César Franck, et si, comme moi, vous avez passé de nombreuses heures de votre adolescence envoutés par The Last Express, vous pourrez peut-être comprendre.
Donc, quand on m'a annoncé du Debussy, j'ai dit "Alright" mais en fait je pensais "Rah fichtre le nom de ma salle de piano".
Ouais. Parce que dans ma ville de bouseux consanguins, pour montrer que t'es moins un bouseux consanguin que ton voisin, il faut s'inscrire à l'école de musique.
Une fois inscrite il m'a fallu me taper 2 ans de solfège avant d'avoir le droit d'approcher un instrument. Sauf que ça faisait dix plombes que je pianotais sur l'instrument familial et que je trouvais ça fada cette sacro-sainteté qu'on mettait entre nous, petits élèves ignares et le gros truc à cordes.
Dans ma tête de môme de 9 ans, le piano, je maîtrisais (ah ah), comme je pensais maîtriser la littérature après avoir appris seule à lire à 4 ans et des poussières. Du coup je voulais faire de la batterie. Mais, pour la batterie, pas besoin de solfège, et ça, ça craignait pour les stats de l'école. Du coup convocation chez le grand chef (déjà, à l'époque), qui, entre deux ou trois allusions à ma tante, son ex, dont il n'a jamais digéré le départ avec mon oncle d'Amérique, m'explique que mes soeurs ont fait du piano et que je ferai du piano.
Comme je suis une tête de cochon et que celle de ma prof ne me revenait spécialement pas, j'ai fait ma loque humaine et j'ai freiné de tous mes doigts. Si bien que je me souviens de looongues semaines où la morue ne daignait pas me faire jouer autre chose que "Fais dodo" et que j'ai failli sérieusement bouffer mes partitions couvertes d'un plastique bleu pétrole déchiré.
Jusqu'au jour où. Dieu m'a donné une nouvelle prof de piano. Douce, gentille & belle. Qui, après m'avoir psychanalysé pendant trois ou quatre séances où on a fait que parler, a dégainé l'arme secrète, le challenge, the big bang theory, ce morceau. Avec passage en mains indépendantes et tout et tout. J'avais 2 ans de piano derrière moi, -2 ans en pratique, et elle me collait ça entre les mains en me disant "et dans 2 mois tu passes devant la ville entière, va mon enfant".
Du coup, je révisais jusqu'à sur mon bureau du collège, avec des fausses touches dessinées au stylo bille. J'en rêvais la nuit. Bon, on ne dira pas que le jour du fameux récital je me suis vautrée lamentablement sur la reprise et ce, devant mon cousin chéri venu m'admirer des states (et qui m'a servi un discours de remontage de moral à la Eric Taylor, après mon foirage)(même si je suis sûre que si j'ai plus de ses nouvelles depuis 3 ans c'est parce que j'ai grandement failé ce jour là, JE LE SAIS.). Et maintenant quand on me colle devant un piano y'a que cette putain d'Histoire Romantique qui sort. Comme un bug informatique, j'ai pas dépassé la faille. L'année d'après j'arrêtais les cours de piano parce que j'en pouvais plus du solfège (et de la glotte proéminente de mon prof aux yeux globuleux, aux cheveux gras et au prénom pourri). Du coup, question culture G et compréhension du classique, c'est un peu comme pour la philo : je fais un blocage.
Et c'est à ça que je pensais en regardant ces gens qui ont voué leur vie à ça. Que je comprendrais jamais. Que c'est trop tard. Que ma vie, si j'avais fait de la batterie, aurait été super différente. Que j'aurais pas été une victime mais une winneuse, un Hitler au féminin maybe, mais d'un point de vue purement personnel, il a plus ou moins réussi sa vie.
Ne nous emballons pas. Et parlons Suédois. Enfin. Danois. Enfin bourges du XXème qui se réunissent à la Bellevilloise pour toiser ceux qu'ils croisent et ignorer ceux qui les entourent.
Ce soir nous étions à la Halle aux Oliviers, et, même si on s'est pas fait refouler, on a du batailler ferme pour s'assoir vu la moue dubitative de la serveuse qui a compris qu'on avait pas l'intention de consommer. Parce que La Bellevilloise, ils ont la facheuse habitude de mettre partout que c'est entrée libre leurs concerts, mais genre le dimanche, vas-y pour y aller à leur concert, vu qu'ils ont des employés en forme de cerbères qui font "nan z'avez pas réservé et c'est juste pour les gens du brunch" "mais va te faire foutre, t'avais qu'à engager un webmaster moins à fond sur la dope qui colle pas des "entrée libre" à chaque fin de phrase, bordel"
Oui, parfois, après trois semaines de concert et à la veille d'un entretien et à l'avant-veille d'une soutenance de mémoire, je suis fébrile, un peu.
Bref. Lasse Mathiessen est un Danois folkeux qui a une guitare, une voix et un joli étui (pour sa guitare, pas sa voix), qui serait très mauvais s'il était commercial, mais très bon s'il était mannequin pour agence de voyage en Danoisie. Bref, Lasse est beau, il a une voix à tomber par terre, mais, malheureusement pour lui, j'avais un livre de vampires psychotiques à la con à terminer en urgence pour ma patronne, du coup je l'ai terminé en face de Lasse, et Lasse est très détendant. Sa musique fait limite ascenseur, et ce sera ma critique. Sa musique est une bonne toile de fond pour la rêverie et l'imaginaire, et ce sera mon compliment. Tu le prends comme tu veux.
Oh, et si tu veux le 06 de Hélo, ça peut se négocier si t'as le 06 d'Andreas Johnson en échange, comment ça "Il est suédois, rien à voir" ?. Ces scandinaves. Des cheveux clairs mais aucun humour.
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